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Los Angeles,

le 24 février 2017

V. Vale, l’éditeur de Re/Search et fondateur de Search & Destroy, est à la fois un genre de maître Jedi, une légende du Punk et un anthropologue DIY. Le texte Punk Philosophy qu’il est en train d’écrire est une sorte de manuel DIY pour une rébellion permanente. Dans les années 1980, il a fondé Re/Search Publications et a poursuivi le travail de documentation du punk, en publiant des livres sur toutes les différentes sous-cultures qui en sont issues : Penny Rimbaud, Lydia Lunch, Genesis P-Orridge, J. G. Ballard, Bob Flanagan sont quelques-unes des personnes avec lesquelles V. Vale a travaillé. Vale a travaillé avec, il a publié *Incredibly Strange Films, Artists of the Industrial Scene, Modern Primitives, Zines ! Vol I & II, The First History and DIY Guide, et même un Guide to Bodily Fluids… V. Vale est une légende.

J’ai toujours été stupéfait de voir que quelqu’un de son âge ait l’énergie de passer plusieurs journées d’affilées dans une foire bondée à parler avec passion des artistes légendaires qu’il a fréquentés et dont il a documenté le travail. Alors que la plus grosse journée de la Los Angeles Art Book Fair est encore calme, je le tire à l’écart dans un auditorium vide et il prend quelques minutes pour répondre à mes questions. Je prépare la caméra et son image se détache à peine dans cette salle où seul des lumières blafardes sont laissées allumées.

Salut Vale. C’est Vale ou V. Vale ?

V. Vale c’est bien.

Je ne te demanderai pas de te présenter, car même si les gens ne te connaissent pas en personne, ils connaissent le travail que tu as fait pour Search and Destroy et RE Search. Peux-tu nous dire comment tu as commencé à faire ce genre de recherches ?

La colère. C’est une excellente motivation pour faire des choses. J’étais très en colère contre la couverture médiatique conformiste et très sporadique de la contre-culture punk rock internationale qui était en train d’émerger. Je savais que ça allait être le prochain grand mouvement de créativité dans la culture, le prochain mouvement d’invention culturelle. Pour exister, la culture doit être imaginée, inventée et créée. Elle n’apparait pas d’elle-même. Pourtant, à cette époque, tout le monde se moquait, s’ils avaient pris la peine de traiter le sujet. Souvent, la meilleure façon d’aider un mouvement, surtout un mouvement de contre-culture soi-disant révolutionnaire, c’est de lui donner une couverture médiatique, et ils ne voulaient même pas le couvrir. J’ai donc décidé de le couvrir dès le départ, avec très peu d’argent. Je n’avais pas d’argent à l’époque, mais je travaillais à la librairie City Lights et le gérant m’a dit : « Demande à Allen Ginsberg. » Il était en ville pour un mois, c’était Noël 1976, et il m’a immédiatement fait un chèque de cent dollars. J’ai apporté ce chèque à Lawrence Ferlinghetti qui était à l’étage, il m’a fait un chèque de cent dollars pour l’égaler. Après, un de mes chers amis qui travaille comme médecin a dit : « Oh, je peux mettre deux cents », parce qu’il gagnait plus et qu’il était généreux. Il faut de l’argent pour commencer, pour faire le boulot, parce que si quelqu’un te donne de l’argent, c’était pas des prêts, c’était des dons, tu veux tenir ta parole. Tu veux t’assurer que de produire quelque chose de qualité, ou quel que soit le mot.

C’est comme ça que tu as créé Search and Destroy ?

La colère. Tu dois avoir une motivation. Sinon, tu ne fais rien. Il te faut un moteur, c’est ce que c’est. La colère est une pulsion très puissante. Ce sont les pulsions qui vous font faire des choses dans la vie. Sinon, tu te laisses aller.

Donc tu documentais la culture punk qui émergeait dans la région de San Francisco ?

Enfin, pas dans le monde entier, et je ne faisais pas que documenter. Ce que je voulais plutôt, c’était donner des idées et catalyser. Je voulais fournir ce qu’on appelle des mèmes, mais ce mot n’avait pas encore été inventé à l’époque, des archétypes. Je voulais encourager la rébellion, car je pense qu’en l’absence de rébellion, il n’y a pas de créativité. Hegel a dit ça en 1800 quelque chose. Pour faire quelque chose d’original, si vous ne vous rebellez pas, vous devez être super critique de ce qui se passe et de ce qu’on appelle la théorie du statu quo.

Combien de temps après avoir commencé Search and Destroy, as-tu créé RE Search et commencé à considérer ton travail comme de la recherche ?

Il m’a fallu beaucoup de temps pour sortir le premier numéro parce que je n’avais jamais fait ça avant. Je n’avais jamais appris, je n’avais aucune formation et je voulais que ce soit de bonne qualité. J’ai mis des mois avant de pouvoir sortir mon premier numéro. J’ai choisi un modèle facile à l’époque, les premiers numéros du magazine Interview d’Andy Warhol. Il n’y avait eu que neuf numéros ou quelque chose comme ça d’Interview et j’ai mesuré les colonnes avec une règle en essayant de faire une copie assez exacte, parce que ça marchait. Je ne conseille jamais de commencer avec une feuille blanche, il faut toujours copier ! Ça aide beaucoup ! Trouve quelque chose que tu aimes et copie-le. En faisant ça, tu économises quatre années de formation en école d’art, sérieusement. On avait donc une toute petite scène punk rock, elle s’est développée, et le punk, c’est des gens, ce n’est pas de la théorie, c’est des humains. C’est pour ça que chaque rébellion punk dans chaque ville était différente, parce que les gens étaient différents. Au début du mouvement punk, on était nombreux, la majorité étaient des femmes et des gays. Mais je vis à San Francisco que les camionneurs appelaient péjorativement la Baie Gay sur leur radio CB. Notre scène était trop belle pour durer. On pensait qu’elle durerait deux ans et c’est ce qui s’est passé. Puis on a été très déprimés quand la scène a changé. Les gens appelaient ça du punk rock, mais ce n’était pas ce que nous appelions punk rock, parce qu’on était une bande de marginaux bizarres qui recherchaient désespérément le plus de liberté possible et la plus grande liberté d’expression. Si tu regardes Search and Destroy, on essayait de détruire toutes les frontières et les limitations esthétiques antérieures qui nous semblaient tout simplement ennuyeuses.

…et qui ne représentait pas ces femmes et ces gays ? Ils et elles n’avaient pas de représentation dans les médias de l’époque ?

Très peu. Il faut se rappeler qu’un de mes mantras est : « D’abord la technologie, ensuite la culture. » La machine Xerox bon marché et accessible au public venait d’être inventée juste avant le punk. Il n’y avait pas de boutiques de photocopie. Maintenant, il y a un tas de boutiques de photocopie concurrentes dans n’importe quelle ville américaine. Mais à l’époque, il n’y avait qu’une petite chaîne appelée PIP, Postal Instant Press, à San Francisco, et il n’y avait que quelques points de vente où l’on pouvait aller. Naturellement, les punks ont commencé à s’y faire embaucher, pour pouvoir rendre service à leurs amis pendant le service de nuit. Mais c’est parce qu’on n’avait pas d’argent.

Donc les premiers numéros de Search and Destroy étaient des photocopies ?

Non, non, j’ai payé cher pour avoir l’imprimeur des petits journaux locaux. Ces presses à imprimer sont grosses comme un petit entrepôt, les machines sont énormes, le papier est très large sous forme de rouleaux. C’est impressionnant de voir le processus d’impression et de reliure. C’est tellement énorme et ancien, ça prend tout l’entrepôt. C’est parce que je voulais avoir une grande photo en page centrale de chaque numéro, mais énorme, que les gens pourraient mettre sur leur mur.

Plus tard, dans les années 1980 et 1990, tu as commencé à documenter toutes sortes de sous-cultures ?

Tout ça vient du Punk, parce que le Punk était petit et unifié. Au début, tout le monde était un genre d’artiste, que tu saches dessiner, prendre des photos ou écrire de la poésie, peu importe. C’est un mouvement très créatif, en fait c’est ce que le punk est vraiment, il ne s’agit de rien d’autre que d’être aussi créatif que possible. C’est un puissant moteur de création de se moquer de quelque chose que tu détestes ou qui te met en colère. On s’amuse beaucoup à être satirique, à être ironique, à se moquer tout simplement. Comme en modifiant des panneaux de publicité. Il y a tellement de publicité, ou il y en avait tellement, qu’il suffit de les modifier, d’ajouter quelques mots différents et soudain, un nouveau message émerge, qui se moque des excès du capitalisme. Je ne suis en aucun cas anticapitaliste, car je suis capitaliste. Je fais un petit bénéfice en vendant mes livres, mes zines et tout le reste. Mais ce n’est pas pour ça que je le fais ; je ne les fais pas pour gagner de l’argent, c’est une grande différence. Je n’arrive pas à trouver une théorie postcapitaliste. J’essaie très fort. Comment imaginer une vie après le capitalisme ? Je ne sais pas, parce que nous avons vu ce que le communisme pur génère et dégénère en corruption.

Alors, considères-tu que ce que tu fais est politique ?

Non, non, c’est la culture, la culture est tout. Je déteste la politique parce que, pour moi, la politique n’est qu’une question de pouvoir, de jeu et de surenchère. Il n’y est question que de pouvoir vraiment.

Mais la façon dont tu crées de la culture n’est-elle pas politique ? Ce que tu vas mettre en avant et le type de personnes que tu vas montrer ?

Eh bien, si on présente les choses différemment, je suis plutôt contre le statu quo des principales valeurs de la société qui sont « va à l’école, trouve un travail et ne te rebelle pas », et ne sois pas créatif. Le système scolaire devrait apprendre à lire, écrire, dessiner et prendre des photos très tôt dans la vie pour qu’on puisse renverser notre système de valeurs sociales. Mais en fait, on ne veut pas le renverser totalement. Je pense qu’on veut juste plus de liberté et de plaisir.

Et ce n’est pas politique ? Tu sèmes les graines de la rébellion chez les gens depuis 40 ans. On était en train de parler avec une artiste qui disait que l’une de tes publications l’avait vraiment poussée dans les années 1990 à devenir une femme artiste en colère. C’est politique, n’est-ce pas ?

Pas pour moi, c’est culturel.

Dans la philosophie punk sur laquelle tu travailles, tu dis que l’humour noir est l’une des principales caractéristiques de la culture punk ?

Voilà pourquoi, c’est si simple à comprendre. Il y a tellement d’injustices partout qui nous mettent en colère, qui nous agacent, mais si tu te met en colère, tu te fais du mal, et tu attrapes un ulcère. Non ! Il faut faire de son mieux pour s’en moquer, faire de l’humour noir, s’en moquer, en rire et ensuite on peut passer à autre chose. Tu auras un meilleur état d’esprit, parce que je te jure que tous les médias, tout est conçu pour que tu te sentes encore plus mal dans ta peau. Le punk dit non ! Un bon état d’esprit est très important. Dans une société comme celle-ci, tu dois avoir le plus d’humour possible et le créer.

Je suis désolé si je reviens à la politique, mais ce type de raisonnement n’est-il pas à l’origine du mouvement libertarien ?

Oh, je déteste ça, c’est des conneries. C’est ce que les conservateurs savent si bien faire ; ils volent tout le langage qui était autrefois réservé à la soi-disant gauche. Je ne m’identifie à personne, ni à gauche ni à droite. Je sais que je suis un outsider.

Ils parlent de disruption…

Je pense qu’il faut juger par les actes et non par les mots. Si vous regardez ce qui a été fait ces dernières années, les riches sont devenus plus riches, la classe moyenne s’est appauvrie et il y a beaucoup moins de créatifs. C’est pour ça que le punk est si précieux, car il s’agit de créer son propre emploi, tu dois le faire toi-même. Tu ne peux pas te contenter de dire « Oh, je vais postuler à un million d’offres et espérer qu’une entreprise m’embauche ». Non, oublie ça. Tu dois utiliser la créativité qui est en toi pour créer ton propre job. Tu dois trouver des personnes avec qui travailler, parce que ça aide vraiment si tu as au moins une personne qui surveille tes arrières et avec qui tu peux échanger des idées. Parce que dès qu’il a deux personnes, toi et ton meilleur ami, ça fait un groupe de réflexion. Lorsque vous êtes ensemble, vous trouvez des idées auxquelles aucun de vous n’aurait pu penser seul. C’est à ça que servent les amis, à faire des projets. Pas de projets ? Tu ferais mieux de trouver des amis avec qui faire des projets.

Le projet que je mène actuellement porte sur les zines d’artistes, c’est-à-dire les zines réalisés par des artistes, et sur la relation entre les zines dans la culture et les scènes artistiques contemporaines. Quel est ton point de vue sur ça ?

J’ai dit que tout le monde peut faire des zines. Je pense qu’il n’est probablement pas trop tôt, vers 8-10 ans, pour commencer à faire des magazines pour enfants. Dès qu’ils apprennent à écrire à peine, ou même avant quand ils savent dessiner. Quand ils peuvent apprendre une langue suffisamment pour la parler et l’écrire. Je pense que c’est mieux si tu sais écrire. Il y a 200 ans, les femmes n’allaient même pas à l’école, il n’y avait que des hommes. Il y a seulement 200 ans, un si grand nombre de personnes étaient analphabètes dans le monde, ce sont donc de grands cadeaux qui doivent être partagés. Je pense que le monde est beaucoup plus amusant si tout le monde est créatif. Les zines sont si importants parce que la technique du zine est moins importante que leur contenu. En d’autres termes, l’apparence du zine doit-elle être lisse ou ressembler à une publicité ? Non, il peut être fait à la main, dessiné à la main et tout ça, mais le facteur important est qu’une personne contrôle à 100 % ce que devient le zine. Donc tout artiste digne de ce nom devrait faire un zine comme un rite de passage, si ce n’est pour le reste de sa vie. Comment devient-on soi-même sans faire quelque chose ? Si je te rencontre, je te demande : « Qu’as-tu fait ? » Sinon, je ne sais pas qui tu es. Si tu n’as rien fait, je suis désolé pour toi, mais je vais essayer de t’aider, « C’est quoi le projet ? Fais quelque chose. Fabrique quelque chose. Prend des photos, dessine. » Ça coûte pas cher, du papier et un crayon pour écrire, pour faire des dessins. Tout le monde a un téléphone portable, tu peux faire de belles photos artistiques.

C’est comme ça que tu considères ton travail, comme une incitation à l’action ?

Bien sûr que oui ! On est ici pour inspirer. Le seul but de faire quelque chose, c’est d’inspirer quelqu’un d’autre. Je le pense vraiment.

Pour donner du pouvoir ?

Pour être créatif, parce que cela libère quelque chose en toi qui était frustré et dormant, mais qui a toujours été là. J’ai cette devise : « Tout le monde est un artiste et un scientifique ». Les gens ricanent et je leur dit : « Non, je me fiche que tu n’aies jamais fait d’art, tu as certainement fait des rêves. Dans tes rêves, tu as tout créé, ton subconscient l’a fait. Tu as écrit des dialogues, tu es donc un scénariste. Tu as créé les costumes des personnages, tu es donc un costumier. Tu as choisi un angle de prise de vue, un éclairage, tu as conçu le décor, tout est dans ta tête. Tu es un artiste parce que tu as fait un rêve. Tu as tout fait dans ce rêve, tu es cinéaste et le cinéma est le roi de tous les arts. » Et je leur dit : « Tout le monde est scientifique parce qu’il n’y a pas une âme sur la planète qui ne veuille pas savoir comment ce monde fonctionne. » Personne ne veut être embobiné et trompé. Tout le monde veut savoir ce qui se passe vraiment, comment les choses fonctionnent.

Tu dis que tout le monde est un scientifique, mais je crois que tu n’es pas allé à l’université ?

Bien sûr que si. Tu dois aller à l’université. Je pense que c’est très utile parce que je pense qu’il faut un certain temps pour découvrir ses compétences et qui on est…

Et qu’as-tu étudié à l’époque ?

J’ai tout étudié. Je pensais que je voulais être médecin, mais j’ai pris mon premier cours de dissection et j’ai dit : « Ah, je ne peux pas faire ça, c’est trop horrible. » Il y a des gens qui font ça et qui adorent ça, on ne sait pas qui on est tant qu’on ne fait rien.

Y a-t-il une grande part de méthodologie dans ce que tu fais ?

Je n’appelle pas ça comme ça. Je lis beaucoup parce que je suis curieux. Je veux tout savoir, sauf si c’est vraiment difficile à lire. C’est pour ça que j’ai publié un livre sur l’intelligence artificielle, car je ne savais pas ce que ça voulait dire. J’ai rencontré un Russe génial qui parle sept langues et il a écrit le livre pour moi. Je lui ai dit : « N’abêtis pas ton propos, mais rends-le aussi drôle que possible. Fais-en une satire, sinon personne ne le lira. » Nous avons mis de belles illustrations drôles et essayé de faire une belle mise en page. C’est un jeu pour moi, « À quel point je peux rendre ça beau ? ou drôle ? ou intelligent ? » Si tu n’as pas ces objectifs, rien ne se passe. Rien ne se passe si tu n’as pas de buts, rien n’est accidentel.

Tu as cité Hegel tout à l’heure, quels sont les penseurs qui t’ont influencé ?

Hegel a eu une énorme influence. J’ai essayé de lire l’Histoire de la philosophie occidentale, c’était une collection qui s’appelait les Grands Livres du monde occidental. Je les avais quand j’étais gamin, ils sont difficiles à lire, mais ils te montrent qu’il y a plus de choses sur le ciel et la terre que tu n’en as rêvé. J’encourage tout le monde à être aussi curieux que possible et à lire autant que possible. Ne vous contentez pas des informations que vous recevez sur le fil d’actualités de votre iPhone, car ce sont des lectures superficielles. Prenez du temps en silence. L’un de mes mantras est « silence, solitude, scepticisme », c’est la fin de cette interview.

Parfait, merci beaucoup.

Los Angeles,

February 24th, 2017

V. Vale, the publisher of Re/Search and founder of Search & Destroy, is something between a Jedi master, a punk legend, and a DIY anthropologist. The Punk Philosophy that he is currently writing is a sort of DIY manual to permanent rebellion. In the 1980s, he founded Re/Search Publications and continued the work of documenting punk by publishing books about all of the different subcultures coming out of it, “because punk is only about being as creative as you can be.” Penny Rimbaud, Lydia Lunch, Genesis P-Orridge, J. G. Ballard, Bob Flanagan are some of the people V. Vale worked with, he published Incredibly Strange Films, Artists of the Industrial Scene, Modern Primitives, Zines! Vol I & II, The First History and DIY Guide, and even a Guide to Bodily Fluids… V. Vale is a legend.
I’ve always been amazed to see someone his age have the energy to spend several days in a row at a crowded fair talking passionately about the legendary artists he hung out with and whose work he documented. While the biggest day of the Los Angeles Art Book Fair was still slow, I pulled him aside in an empty auditorium, and he took a few minutes to answer my questions. I set up the camera, and his image barely stands out in this room, where only dim security lights are left on.
Hi Vale. Is it Vale or V. Vale?

V. Vale is fine.

I won’t ask you to introduce yourself, because even if people don’t know you in person, they know the work that you’ve done for Search and Destroy and RE Search. Can you tell us how you started doing this kind of research?

Anger. It’s a great motive to do something. I was very angry at the conventional and very scarce press coverage of the emerging punk rock counterculture, which was international. I knew this was going to be the next big cultural inventive movement, the next cultural invention movement. Culture has to be imagined, invented, and created. It just doesn’t happen by itself. But yet everyone was making such fun of it at the time, if they even bothered to cover it all. A lot of times, the best way to help a movement, especially a so-called revolutionary counterculture movement, is to give it coverage, and they wouldn’t even cover it. So I decided I was going to cover it from the get-go with very little money. I didn’t have any money at the time, but I was working in City Lights bookstore, and the manager said, “Ask Allen Ginsberg.” He was in town for a month; this is Christmas 1976, and he instantly wrote me a check for a hundred dollars. I took that check to Lawrence Ferlinghetti, who was upstairs, and he wrote me a check for a hundred to match it. Then another dear friend of mine who works as an MD doctor said, “Oh, I can pay two hundred,” because he made more and he was generous. You need money to start, and you also try to deliver the goods, because if someone gives you money, these were not loans; they were gifts. You want to be good for your word. So you want to be sure that you produce something that tries to be kind of quality, or whatever the word is.

So that’s how you created Search and Destroy?

Anger. You gotta have a motive. Otherwise, you don’t do anything. You don’t have a drive; that’s what it is. Anger is a very powerful drive. It’s drives that make you do things in life. Otherwise, you just coast along.

So you were documenting the emerging punk culture in the Bay Area?

Well, not worldwide, and I was not only documenting. What I rather wanted was to give ideas and catalyse. I wanted to provide what you call memes, but that word hadn’t been invented then. Archetypes. I wanted to encourage rebellion because, in the absence of rebellion, there’s no creativity. Hegel said that in eighteen hundred or something. To do something original, if you don’t rebel, you have to be super critical of what’s going on and of what they call status quo theory.

How long after you started Search and Destroy did you create RE Search and start considering your work as research?

It took me a long time to really get the first issue out because I had never done that. I hadn’t gotten to school; I had no training, and I wanted it to be kind of good quality. It took months before I could get my first issue out. I picked an easy model at the time Andy Warhol’s early Interviews. There had only been nine issues, or something of Interview and I measured the columns with a ruler, trying to do a pretty exact copy, because it worked. I never advise starting with a blank sheet of paper; always copy! It really helps! Find something you love and copy it. That way, you just cut through four years of art school training. Seriously. So we had a very tiny punk rock scene; it grew, and punk is people; it is not theory; it’s humans. That’s why every punk rebellion in every city was different, because the people were different. Our early punk movement was large, with the majority of people being women and gays. But I’m living in San Francisco, which used to be pejoratively called the Gay Bay; that’s CB radio trucker slang. Our scene was too good to last. We figured it would have two years and it did. Then we got really depressed when the scene changed. People called it punk rock, but it wasn’t what we called punk rock because we were a bunch of weirdos outsiders who were desperately seeking as much freedom as possible and as much freedom of expression. If you look at Search and Destroy we were trying to destroy all the previous hidebound aesthetic boundaries and limitations that we felt were just boring.

######…that didn’t represent all of these women and gay people? They weren’t represented in any media at the time? Very few. You have to remember that one of my mantras is, “First technology, then culture.” The cheap, publicly accessible Xerox machine had only just been invented just before punk. You didn’t have copy centres. Now there’s like a bunch of competing copy centres in any city in America you go. But back then, there was just barely one little chain called PIP, Postal Instant Press, in San Francisco, and there were only a few outlets you could go to. Of course, the punk rockers started to get jobs there, and then they could start doing favours for their friends on the night shift. But that’s because we had no money.

So the first issues of Search and Destroy were photocopied?

No, no, I paid big bucks to have the printer of the local small newspapers. These printing presses are as big as a little warehouse; the machines are enormous; the paper is really wide; and it comes on rolls. It’s awesome to watch the printing process and binding. It’s so huge, it’s antique, and there’s hardly any place left. It’s because I wanted to have a big, but huge, photo in the centrefold of each issue that people could put on their wall.

Later on, in the 1980s and 1990s, you started documenting all kinds of subcultures?

Well, it’s all out of punk, because punk was small and unified, and everybody at the beginning would be some kind of artist, whether they could draw, take photos, write poetry, or whatever. It’s a very creative movement; in fact, that’s what punk truly is about; it’s not about anything other than being as creative as you can be. It’s a powerful drive to create if you are making fun of something you hate or that makes you angry. You have a lot of fun being satirical—you know, ironic—just plain making fun. It’s just like modifying billboards. There’s so many billboards out there, or there used to be, and you just tweak it, add a few different words, and suddenly a whole new message emerges that makes fun of capitalism’s excesses. I’m not anti-capitalist by any means, because I am a capitalist. I do make a small profit selling my books, zines, and everything. But that’s not why I do them; I don’t do them to make money. That’s a big difference. I cannot figure out a post-capitalist theory. I’m trying really hard. How can you have life after capitalism? I don’t know, because we’ve seen that pure communism just generates and degenerates into cronyism.

So do you consider what you do political?

No, no, it’s culture; culture is everything. I hate politics because, to me, politics is all about power, gamesmanship, and one-upmanship. It’s about power, really.

But isn’t the way you create culture political? What are you going to highlight, and what types of people will you show?

Well, let’s just put it another way. I am pretty much against the status quo of society’s main values, which are “go to school, get a job, and don’t rebel,” and don’t be creative, actually. The school system should teach you how to read, write, draw, and take photos really early in life so you can overthrow our social value system. But actually, we don’t want to totally overthrow it. I think we just want way more freedom and fun.

And that’s not political? You have been planting the seed of rebellion in people for 40 years. We were just talking with an artist who said that one of your publications really influenced her to be an angry woman artist in the 1990s. That’s political, isn’t it?

Not to me, it’s cultural.

In the Punk philosophy that you are working on, you say that dark humour is one of the main features of punk culture?

Here’s why: it’s so simple to understand. There is so much injustice everywhere that makes you angry and annoyed, but if you get angry and harm yourself, you get an ulcer. No! You have to do your best to make a mockery of it, do black humour, make fun of it, get a laugh, and then you can move on. You have a higher morale too, because I swear everything in the media and everything out there is designed to make you feel worse about yourself. Punk says no! High morale is very important. In a society like this, you have to have as much humour as possible, and you create it.

I’m sorry if I’m going back to politics, but isn’t that kind of thinking what led to the libertarian movement?

Oh, I hate that; that’s BS. That’s what the Conservatives are getting so good at doing; they’re stealing all the language that used to be only done by the so-called left. I don’t identify with anyone, left or right. I know I’m an outsider.

They talk about disruption…

I say judge by deeds, not words. If you look at what has been done in the last few years, the rich have gotten richer, the middle class has gotten poorer, and there’s been a lot less creative. This is why Punk is so valuable, because you have to create your own job; you have to do it yourself. You can’t just say, “Oh, I’m gonna just apply for a million jobs and hope some corporation hires me.” No, forget it. You’ve got to use the creativity inside yourself to create your own jobs. You gotta find a few people to work with, because it really helps if you have at least one person watching your back and to bounce ideas off. Because every pair of persons, you and your best friend, are a think tank. When you get together, you think of ideas that neither one of you could have thought of on your own. That’s what friends are for—to do projects with. No projects? Well, you better find friends you do projects with.

So you know that this project that I’m doing is about art zines, about zines made by artists, and the relationship between zines in culture and contemporary art scenes. How do you consider that?

I said zines should be made by all. I think it’s probably not too early in the third to fourth grades to start having children’s magazines. Whenever they can barely learn to write, or even before they can draw. When they can learn a language enough to speak and write it. I think it’s handy if you are able to write. 200 years ago, women weren’t even in schools; it was only men. So many people were illiterate in the world only 200 years ago, so these are all great gifts that must be shared. I think it’s a much more fun world if everyone’s creative. A zine is so important because the technique of the zine is less important than the content. In other words, how slick does it look, or does it look like a corporate ad? No, it can be handmade, hand-drawn, and all that, but the important factor is that one person has 100% control over what ends up being the zine. So every artist worth their salts got to do a zine as a rite of passage, if not throughout the rest of their lives. How do you become yourself without doing something? I meet you, and I ask you, “What have you done?” Otherwise, I don’t know who you are. If you haven’t done anything, I feel sorry for you, but I’ll try to help you. “What’s the plan? Make something. Do something. Take pictures. Draw.” These are very cheap: paper and pencils to write on and to make drawings. Everyone has a cell phone, so you can make beautiful art pictures.

So is that how you consider your work, like giving incentives to people?

Hell yes! We’re here to inspire. The only point of doing anything really is to inspire someone else to. I really think that.

To give power?

To be creative, because it releases something inside you that was frustrated and dormant, but it was always there. I have this motto that, “Everyone is an artist and a scientist,” and people used to scoff at me, and I say, “No, I don’t care if you’ve never done any art; you’ve certainly had dreams. In your dream, you created everything; your subconscious did. You created the dialogue lines, so you’re therefore a scriptwriter. You created the costumes for the people; therefore, you’re a wardrobe person. You did the camera work, the lighting, and you designed the set; it’s all in your head. You are an artist because you had a dream. You made everything in that dream; you’re a filmmaker, and we all call filmmaking the king of all the arts.” Then I said, “Everyone’s a scientist because there isn’t a soul on the planet that doesn’t want to know how this world really works.” We don’t want to be bamboozled and fooled. We want to know the real deal—how things work.

You’re saying that everyone is a scientist, but I think you didn’t go to university?

Of course, I did. You need to go to university. I think it’s very useful because I think it takes a while to figure out your skills and who you are.

And what did you study, then?

I studied everything. I thought I wanted to be a doctor, but then I took my first dissecting class, and I said, “Ah, I can’t do this; this is too horrific.” Some people would do that and love it. You don’t know who you are until you do something.

Is there a great deal of methodology in what you do?

I don’t call it that. I do a lot of reading because I’m curious. I want to know about everything, unless it’s really hard to read. That’s why I did a book on artificial intelligence, because I didn’t know what the heck it meant. I met a genius Russian who speaks seven languages, and he did the book for me. I said, “Don’t dumb it down, but make it as funny as possible. Make it a satire; otherwise, no one will read it.” We put in nice, funny illustrations and tried to do a beautiful layout. These are kind of games for me: “How beautiful can I make something? How funny? How witty can I make something?” If you don’t have these goals, nothing happens. Nothing happens without goals; nothing is accidental.

You quoted Hegel earlier; who are the thinkers that influenced you?

Hegel had a huge influence. I’ve tried to read through the history of Western philosophy; they used to call it the Great Books of the Western World. I got them as a kid; they’re hard to read, but they show you that there are more things on heaven and earth than you have dreamed of. I encourage everyone to be as curious as they can be and to read as much as possible. Don’t just be content with the information you get in your iPhone news feeds, because that’s BS and superficial reading. Take some time and sit in silence. So one of my mantras is “Silence, Solitude, Scepticism.” That’s the end of this interview.

Perfect, thank you so much.
Terminal Punk, Punk Philosophy
V. Vale, *Terminal Punk, Punk Philosophy*, San Francisco, Re/Search Publications, 2016 (4e édition), 5,5" x 8,5", Photocopie, 48 pp. V. Vale, *Terminal Punk, Punk Philosophy*, San Francisco, Re/Search Publications, 2016 (4th edition), 5,5" x 8,5", Photocopy, 48 pp.
V. Vale Bio-Comic
Krusty Wheatfield, *V. Vale Bio-Comic #0*, San Francisco, Re/Search Publications, 2016 , 7.5″ x 10.5″, Impression jet d'encre, 24 pp. Krusty Wheatfield, *V. Vale Bio-Comic #0*, San Francisco, Re/Search Publications, 2016 , 7.5″ x 10.5″, Inkjet printing, 24pp.
Lost Angels of Los Angeles
V. Vale & Danielle Neu, *Lost Angels of Los Angeles*, San Francisco, Re/Search Publications, 2016, 5,5" x 5,5", Impression jet d'encre, 20 exemplaires. V. Vale & Danielle Neu, *Lost Angels of Los Angeles*, San Francisco, Re/Search Publications, 2016, 5,5" x 5,5", Inkjet printing, Folded 11" x 17" sheet, 20 copies.
Search & Destroy #11
V Vale, *Search & Destroy #11*, San Francisco, 1979, 28,7 x 44 cm, Offset, 24 pp V Vale, *Search & Destroy #11*, San Francisco, 1979, 28,7 x 44 cm, Offset, 24 pp
Search & Destroy #10
V Vale, *Search & Destroy #10*, San Francisco, 1978, 28,7 x 44 cm, Offset, 26 pp V Vale, *Search & Destroy #10*, San Francisco, 1978, 28,7 x 44 cm, Offset, 26 pp
Search & Destroy #9
V Vale, *Search & Destroy #9*, San Francisco, 1978, 28,7 x 44 cm, Offset, 30 pp V Vale, *Search & Destroy #9*, San Francisco, 1978, 28,7 x 44 cm, Offset, 30 pp
Search & Destroy #7
V Vale, *Search & Destroy #7*, San Francisco, 1978, 28,7 x 44 cm, Offset, 22 pp V Vale, *Search & Destroy #7*, San Francisco, 1978, 28,7 x 44 cm, Offset, 22 pp
Search & Destroy #6
V Vale, *Search & Destroy #6*, San Francisco, 1978, 28,7 x 44 cm, Offset, 26 pp V Vale, *Search & Destroy #6*, San Francisco, 1978, 28,7 x 44 cm, Offset, 26 pp
Search & Destroy #5
V Vale, *Search & Destroy #5*, San Francisco, 1978, 28,7 x 44 cm, Offset, 22 pp V Vale, *Search & Destroy #5*, San Francisco, 1978, 28,7 x 44 cm, Offset, 22 pp
Search & Destroy #4
V Vale, *Search & Destroy #4*, San Francisco, 1977, 28,7 x 44 cm, Offset, 22 pp V Vale, *Search & Destroy #4*, San Francisco, 1977, 28,7 x 44 cm, Offset, 22 pp
Search & Destroy #2
V Vale, *Search & Destroy #2*, San Francisco, 1977, 28,7 x 44 cm, Offset, 18 pp V Vale, *Search & Destroy #2*, San Francisco, 1977, 28,7 x 44 cm, Offset, 18 pp
Search & Destroy #1
V Vale, *Search & Destroy #1*, San Francisco, 1977, 28,7 x 44 cm, Offset, 14 pp V Vale, *Search & Destroy #1*, San Francisco, 1977, 28,7 x 44 cm, Offset, 14 pp