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Marseille,

le 22 avril 2016

En France, la rencontre entre le fanzine et l’art s’est longtemps cristallisé autour de la forme du graphzine, que l’on définit parfois comme un zine dépourvu de texte faisant alors la part belle au dessin dans des styles toujours très graphiques, d’où son nom. Le parrain de ce milieu particulier est Bruno Richard dont le zine ESDS (pour Elles Sont de Sortie) créé en 1977 est toujours publié aujourd’hui, et ce malgré la mort de son comparse Pascal Doury en 2001. Dans le graphzine, il s’agit de produire un bruit visuel comparable à une pédale de saturation dans un concert punk, comme le dit Pakito Bolino.
Après avoir commencé au siècle dernier en région parisienne, Pakito publie et imprime désormais dans ses ateliers de la friche Belle de Mai. Après un tour de l’atelier, nous nous installons au Grandes Tables, le restaurant bar de la friche.
Bonjour. Est-ce que tu peux commencer par te présenter et nous raconter un peu ce que tu fais ?

Alors, je m’appelle Pakito Bolino. Je suis dictateur artistique du Dernier Cri depuis 1993. J’ai commencé à faire de l’édition alternative à Paris, dans la banlieue, dans un squat à Ris-Orangis qui s’appelait le « KS ». Au début, c’était un collectif qui s’appelait « Le Dernier Cri » en sérigraphie, qui sortait tous les deux mois. Où je collectais un petit peu la scène graphique de l’époque, sur Paris, qui gravitait autour du Regard Moderne, comme Kérosène, Blanquet, Pierre La Police. Et après, j’ai commencé à faire des monographies. Et, au bout de deux ans, j’ai déménagé dans le Sud de la France pour avoir assez de place pour mener à bien le projet.

D’accord. Et en quoi consiste l’activité d’un dictateur artistique ?

Bin, en fait, à imprimer. À être l’esclave, parce que je suis pas vraiment dictateur. Je dirais plutôt que je ne suis pas directeur artistique, parce que je n’aime pas le mot « directeur », donc autant être « dictateur ». C’est toujours plus rigolo, et surtout, être son propre esclave, c’est quand même mieux que d’être esclave d’autres personnes.

D’accord. Et comment tu qualifies ce que tu fais ? C’est des graphzines ? C’est des fanzines ? C’est des livres ? Ça dépend ?

Je dirais que c’est des livres. Je dirais même que c’est des livres d’artiste, puisque c’est des petits tirages, et comme c’est un procédé d’impression, essentiellement la sérigraphie, donc je dirais pas que c’est des fanzines, du coup. Parce que pour moi, le terme « fanzine », ça reste quand même rattaché à un côté péjoratif. En tout cas, quand ça a été employé au début, c’était toujours pour rabaisser. C’est pour ça que je dis livre d’artiste, que ce soit libre à la photocopie, en sérigraphie, des petits tirages, c’est de la micro-édition. Je préfère le terme de « micro-édition », par exemple. Je viens du milieu de la BD. J’ai fait une école de BD à Angoulême. Donc le fanzine de BD c’était toujours le truc, un peu de fans, où ils mettaient les articles, les interviews sur les stars de BD. Et justement, j’aime pas ce côté-là, même dans les fanzines de musique avec des interviews de groupes et tout ça. Donc le terme « graphzine » serait plus approprié. Dans le sens où souvent, c’est du dessin. Il y a même pas forcément de texte. C’est vraiment un travail sur l’image.

Et quand on parle de « graphzine », on sait ce qu’on va trouver dedans…

Disons que le graphzine, c’est un zine graphique, quoi. Dans « fanzine », je n’aime pas le mot « fan ». En fait, j’aime pas les fans. J’aime pas les stars. Mais j’aime les zines.

Les anglo-saxons se sont débarrassés du préfixe « fan » et ils disent « zine » partout, ça correspond à différentes choses. Est-ce que tu peux nous parler de cette scène que tu appelles « graphique » et de la façon dont elle est née ?

À mon avis, c’est né de l’underground américain et de la musique underground. Ça vient des années 1960, avec Crumb et toute la clique, toutes ces choses-là, quoi. Jusqu’à l’époque du punk, où vraiment le graphisme est plus violent, novateur, néo-expressionniste. Il était lié à la musique, que ce soit la No Wave. Je suis venu au dessin et à l’édition par la musique. Au départ, c’était les affiches de concerts. Dès que ton graphisme était un petit peu différent, il se retrouvait logiquement associé à un style musical. Il y a beaucoup de dessinateurs que j’édite qui sont aussi musiciens, qui ont des projets en parallèle. Pour moi, c’est la même chose, en fait. C’est toujours lié à un univers musical.

Et, oui, qu’est-ce qu’on trouve comme contenu dans les livres du Dernier Cri alors ?

On trouve la vie. La vie, c’est le sexe, la mort, la chair. Des fois des légumes et des histoires. Des fois ça devient illisible, c’est toujours figuratif, donc c’est un petit peu comme des images proches de l’esprit expressionniste, ou… dadaïste, du photomontage. Il y a des gens qui sont des héritiers de Heartfield, de Kirchner ou de George Gross. Il y a des sensibilités proches du graphisme de l’art brut. Des fois, c’est comme de la BD dégénérée, ou ça peut être de l’art dégénéré pour certains. Je dirais que c’est de l’art dégénéré.

Hahaha ! Comme ça, c’est plus simple. D’autres se sont occupés de le définir pour nous, l’art dégénéré. Et le rapport à la violence ? Qu’est-ce qu’il y a autour de ça, dans les graphzines ? Est-ce que ça fait partie de l’esthétique des graphzines ?

Ils ne sont pas tous violents. Des fois, c’est violent graphiquement. C’est pour ça que je parlais du côté musical. C’est comme l’énergie qu’il y a dans la musique punk, ou bien le free jazz ou la noise. C’est comme des musiciens qui font du dessin, il y a une esthétique comme ça. On croit que c’est violent, pour eux, c’est normal. Ça a une énergie. Une énergie qui fait appel au trait, à la mise en page, aux couleurs utilisées. C’est comme une pédale de saturation. Moi, je dirais que Le Dernier Cri, c’est une pédale de saturation branchée sur une photocopieuse. C’est ça. C’est un traitement de l’image par des humains qui la redessinent, qui la revomissent, qui la retriturent. Souvent, c’est des réactions à des images dont on est abreuvés, étouffés dans les médias ou la pub. Et c’est recraché, c’est revomit. Pour moi, ça devient intéressant parce qu’on va à l’essentiel, et ça devient beau. Ça sublime la chose ou ça la fait disparaître, parce que, souvent, faut juste s’en moquer.

Donc, la saturation de la page qu’on a souvent dans vos publications, c’est comme la saturation d’une guitare punk.

Oui, tout à fait. C’est un petit peu comme dans Orange Mécanique, quand le mec lui nettoie le cerveau, il lui ouvre les yeux et le bombarde d’images. Moi, mon but en tant qu’éditeur, c’est de faire ça. Voilà. Je fais ça pour laver le cerveau aussi. C’est pour ça que le slogan du Dernier Cri, c’est « Vomir des yeux ». Parce que quand on vomit, après on est nettoyé, on a débarrassé l’organisme des choses toxiques.

Et comment est-ce que tu travailles alors ? Tu disais qu’au début, c’était un collectif ?

Comme au début j’étais à Paris, il y avait plusieurs dessinateurs qui gravitaient autour du Regard Moderne. La plupart faisaient des bouquins en photocopie, et à partir du moment où j’ai eu l’atelier sérigraphie, on s’est retrouvé automatiquement à travailler ensemble, à imprimer des bouquins ensemble. Voilà. Après, j’ai commencé à éditer des artistes étrangers que je connaissais pas, à qui j’envoyais les livres et qui m’envoyaient leurs dessins. Daisuke Ichiba, par exemple, m’envoyait ses dessins. Je ne l’avais jamais rencontré. Après, il est venu en France, il est venu nous voir, et après, on a commencé à travailler ensemble. Il a fait une résidence ici [à La Belle de Mai]. Et c’est comme ça, petit à petit, que le cercle s’est élargi. Donc, je ne peux pas dire que c’est un collectif dans le sens où tout le monde n’est pas là en train de travailler tout le temps. Mais j’essaye de faire en sorte que des gens viennent pour faire les livres avec moi. Après, comme le procédé d’impression est le même, comme souvent c’est moi qui fais la mise en couleur parce que les artistes ne sont pas là, ou qu’ils ne savent pas comment marche la sérigraphie, il y a une esthétique commune à la maison d’édition à cause du dictateur artistique et du procédé d’impression.

Voilà ! Et un peu avec une position qui m’intéresse moi personnellement, qui est cette idée d’artiste-éditeur, c’est-à-dire qu’il y a une patte sur tout Le Dernier Cri. Est-ce que tu considères Le Dernier Cri comme une œuvre en soi ?

Ah, bah bien sûr ! Je ne veux pas être frustré de passer mon temps à ne faire que des trucs à moi. Il y a des années, à Paris, je ne faisais que des trucs à moi et pour moi… Ça m’a gavé.

Mais à ce moment-là justement, tu prends les auteurs, tu les digères, ou selon le processus que tu as raconté tout à l’heure tu les revomis ?

Ou du coup, on vomit ensemble, ou ils me laissent faire. Il y a les gens qui veulent faire un livre avec moi, parce que justement, il y aura une interprétation. Il y aura des choses auxquelles ils n’auraient pas pensé.

Donc ils acceptent que ça va passer par ton filtre et ta façon de travailler. Tu penses que c’est quelque chose de commun, cette façon de travailler, que l’éditeur mette sa patte autant ?

Après, il n’y a pas beaucoup d’éditeurs qui ont leurs outils de production. Quand tu fais une maquette et que tu l’envoies pour être imprimée quelque part, ce n’est pas pareil. Quand tu fais un livre, que tu l’imprimes, quand tu le plies, que tu peux faire des formats différents. J’en reviens à la musique, c’est comme si tu décides d’aller enregistrer un disque dans tel studio, avec tel producteur. Tu fais confiance au producteur. C’est cet esprit-là. C’est ça que t’aime, c’est ça que t’as envie d’essayer.

Et quel jeu joue la technique là-dedans ? La sérigraphie ?

Bah, c’est pas vraiment un jeu, c’est plutôt un enfer. Au niveau des couleurs, ça permet d’avoir des couleurs directes. Il y a des contraintes, donc tu ne peux pas faire la même chose que quand tu imprimes un livre en Offset. Du coup, les contraintes deviennent une esthétique.

Et dans la façon de travailler, est-ce que tu fais particulièrement attention à la technique ? Enfin, maintenant, tu dois être juste tellement habitué que la technique fait partie…

Oui, t’es obligé de faire attention. Puis, des fois, t’es obligé d’interpréter les travaux des gens, parce que ça ne marchera pas sinon en sérigraphie. Ça doit être vraiment l’interprétation. Par exemple, quand c’est des photomontages ou des photos et que tu les imprimes dans la sérigraphie, tu n’auras jamais l’effet que t’as en photocopie. T’es obligé de tramer les images, t’es obligé de faire quelque chose de différent. Ça produit une esthétique… Il faut maîtriser son esthétique.

Tu as ton moyen de production sur place, mais as-tu travaillé avec d’autres choses que de la sérigraphie ? De la photocopie, au début ?

De la photocopie, oui. Puis de l’offset. Je travaille avec un petit imprimeur de quartier, donc je mélange l’offset à la sérigraphie. C’est un petit imprimeur, donc c’est pas des grosses machines quadri, donc du coup, c’est couleur après couleur. Donc, c’est de la sérigraphie, mais en offset, donc du coup, je peux avoir des photos.

D’accord, donc tu peux faire des petits tirages avec lui, que tu ne pourrais pas faire dans un atelier offset plus conséquent.

Déjà, l’atelier offset est plus conséquent, il n’ouvre jamais, donc autant faire une couleur directe. À chaque fois, il faut nettoyer la machine. T’as une machine avec 4 couleurs. Quand tu dois faire une couleur à 500 exemplaires, on va te le faire payer très cher. Ou ils te le font en quadri, car ils font tourner leur bécane en quadri. Si tu envoies un fichier en noir et blanc, ce sera pas un vrai noir et blanc, c’est un noir et blanc en quadri. Donc, autant le faire en noir et blanc en photocopie, si tu as une bonne photocopieuse noir et blanc, c’est mieux.

Et pour les livres, tu parlais de 500 exemplaires, ça tu le fais avec cet imprimeur offset ?

Moi, je fais des livres que de 200. Le maximum que j’ai imprimé, c’est 2000 exemplaires en offset. J’ai jamais fait un tirage plus grand que 2000 exemplaires en tout.

C’était quoi ?

C’était Charles Burns, le Tintin dans l’alphabet inventé. Mais il y en a plus.

J’aimais bien les auteurs qu’on pouvait trouver dans RAW, au début des années 1980. Comme Panther, Burns. Donc j’ai essayé de faire des projets avec eux après. J’avais contacté Burns pour faire un livre plus de 10 ans auparavant. J’avais fait une interview avec lui, comme tu le fais là, il y a des années, pour un magazine. Des années après, d’un coup, il m’envoie un projet de livre. C’est le premier livre que j’ai fait avec lui. C’était comme un carnet de croquis, où il redessinait les images de vieilles BéDés. Et cinq ans après, il m’envoie ce bouquin-là, parce qu’il sortait un livre avec Cornelius, il m’a demandé d’en faire une édition pirate, comme les faux Tintin chinois.

…et dans un alphabet inventé. C’est censé être l’alphabet de quelque chose ?

Non, non, non, c’est totalement faux. Des gens ont essayé de le traduire, mais il n’y a pas d’histoire.

C’est juste de la déco en fait ?

Ouais, ouais. C’est un vicieux.

Et il n’a pas non plus voulu faire croire que c’était un alphabet extra-terrestre… Ça ressemble un peu aux alphabets extra-terrestres qu’on voit dans Futurama.

Oui, ou c’est du faux thaïlandais. C’est comme imprimer un faux Tintin dans un pays asiatique.

Oui, d’accord, c’est à ça que ressemble le thaïlandais pour Charles Burns.

Oui. En tout cas, c’est joli, graphiquement, le thaïlandais.

Justement, je voulais te poser la question de ton rapport à la BD. Quand j’explique ce qu’est le graphzine aux gens, je dis que ça ressemble à de l’illustration et à de la BD, mais ce n’est aucun des deux.

Bah, ça peut être de la BD. Mais en vrai, c’est pas vraiment de la BD. C’est des BD retriturées.

Oui, ça ne raconte pas forcément d’histoire.

Ça raconte quand même une histoire, parce que la BD, c’est séquentiel, à partir du moment où, quand tu mets une image derrière une autre, tu racontes déjà forcément une histoire. Même un livre d’images raconte une histoire. C’est une sorte de pratique du cut-up en image. On retriture l’image, que ce soit en photomontage ou en dessin. On régurgite des choses. Et donc, ça peut être des images extraites d’un film qu’on retravaille ou des BD qu’on retravaille. Enfin, c’est comme un collage.

J’imagine que ce genre de chose, ça doit être très mal vu dans le milieu de la BD, non ? Ils doivent détester ça, non ?

Bah oui. Ils commencent un petit peu à s’ouvrir à ça, mais après le milieu de la BD, tu sais ce que c’est. Il y a des éditeurs de BD qui sont sensibles au graphisme. Pour moi, c’est vraiment un travail de graphiste, c’est du dessin. Après, c’est sûr que dans le milieu de la BD conventionnelle, ça leur hérisse le poil.

Et le lien avec l’illustration alors ? Il doit y avoir des artistes avec qui tu travailles qui bossent aussi comme illustrateurs …

Oui, il y en a.

Mais ils ne vont pas considérer ce qu’ils vont faire par exemple pour Le Dernier Cri de la même manière ?

Les gens qui proposent des livres, ou à qui je propose de faire des livres, c’est pour faire un bouquin qu’ils ne pourraient peut-être pas faire normalement chez des gros éditeurs. Ça ne servirait à rien que je fasse la même chose qu’ils pourraient faire chez un gros éditeur. On revient à la notion de « livre objet », car dans un tirage de mille exemplaires, chaque livre est presque unique. Chaque livre est presque un original, je vois ça comme ça. J’ai fait les beaux-arts, mais l’œuvre unique ne m’intéresse pas forcément. Ce qui m’intéresse, c’est le multiple, enfin, pas à des millions d’exemplaires, mais la possibilité de toucher plus de monde, même avec des estampes en sérigraphie à 500 exemplaires, que je vends à 50€. Je ne veux pas vendre des trucs trop chers.

Oui, oui, c’est ça, c’est ce que j’allais te demander. Parce que, dans le principe, tu pourrais très bien les vendre trois fois plus cher.

Mais moi, je viens du punk, de la scène musicale. Je viens du Do It Yourself.

Donc, c’est important pour toi que ça coûte pas cher, que ça reste abordable.

C’est important pour moi que moi je puisse me les payer. Ou, si j’étais plus jeune et que je tombais sur ça, que ça m’ait fait flasher, que je puisse me l’acheter. Parce que quand je flashe sur les artistes d’art contemporain, je ne peux pas me les acheter, même pas une impression. Parce que ça coûte très cher, parce que c’est un marché, que des fois, je trouve un peu ridicule. Mais c’est comme ça. Mais après, même si je fais des livres pas chers, il y a quand même des gens qui spéculent dessus. J’ai vu des bouquins du Dernier Cri qui valent une fortune.

Oui, c’est ça. Le livre de Charles Burns, je suis sûr que je pourrais le trouver, mais très cher.

Voilà. Et il y a des bouquins qui coûtent une fortune sur Ebay alors qu’ils sont encore disponibles au Dernier Cri. Bon après, si les gens ne font pas l’effort de chercher les choses…

Oui. Ça veut dire qu’ils ont envie de se faire prendre leur argent aussi.

Oui, oui. Ils ont envie d’aller acheter dans une galerie, parce que là, pour le coup, ça prend de la valeur parce que c’est acheté dans tel lieu, mais non. Leur valeur, c’est la valeur de l’objet…

Donc, ils sont rares, mais pas nécessairement précieux ?

Euh, ils sont tous précieux. Ils sont pas chers. Ils deviennent chers quand les gens les collectionnent et qu’il n’y en a plus en stock. Comme tout.

Marseille,

April 22nd, 2016

In France, the encounter between zines and art has long been focused on the graphzine format, which is sometimes defined as a zine without text, mostly composed of drawings in styles that are always very graphic, in every sense of the word. The godfather of this uncanny trend is Bruno Richard, whose zine ESDS (for Elles Sont de Sortie) created in 1977 is still published today, despite the untimely death of his partner in crime Pascal Doury in 2001. In the graphzine, it’s all about producing a visual noise comparable to a saturation pedal in a punk concert, as Pakito Bolino puts it. After starting screen-printing in the 1990s in the Paris area, Pakito now publishes and prints in the studio spaces of the Belle de Mai, a former tobacco factory. After a tour of his printshop, we settle in at Les Grandes Tables, the restaurant-bar of the Belle de Mai.
Hello. Can you start by introducing yourself and telling us a little bit about what you do?

So, my name is Pakito Bollino. I’ve been the artistic dictator of Le Dernier Cri since 1993. I started doing alternative publishing in the suburbs of Paris, in a squat in Ris-Orangis called the “KS.” At the beginning, “Le Dernier Cri” was a collective publication printed in silkscreen that came out every other month. In there, I would gather a little bit of the Parisian graphic scene of the time, which gravitated around the bookshop Un Regard Moderne, artists like Kérosène, Blanquet, Pierre La Police. After that, I started to publish monographs. And after two years, I moved to the south of France to have enough space to carry out the project.

OK, and what is the job of an artistic dictator?

Well, mostly printing. Being a slave, because I’m not really a dictator. I wouldn’t say I’m an artistic director because I don’t like the word “director,”  so I might as well be a “dictator.” It’s always more fun, and above all, being your own slave is better than being a slave to other people.

And how would you describe what you do? Do you call them graphzines, fanzines, books? It depends?

I would say that they are books. I would even say that they are artist’s books, because they are made in small print runs, because of the printing process, mostly screen printing. I wouldn’t say they are fanzines, because, to me, the term “fanzine” is still attached to a pejorative side. At least when it was used at the beginning, it was always to belittle. That’s why I call them artists’ books; whether they are photocopied or silkscreened, they are small print runs; it’s small press. I prefer the term “small press,”  for example. I come from a comic book background. I went to a comic book art school in Angoulême. So the comics fanzines were always a thing—a bit of a fan thing—where fans put articles and interviews of famous artists. And I don’t like that side of things, even in music fanzines with interviews with bands and all that. Maybe the term “graphzine” would be more appropriate. In the sense that it’s often just drawings. There’s not even necessarily any text. It’s really a work on the image.

And when we talk about “graphzine,”  we know what we’ll find inside…

Let’s say that a graphzine is a graphic zine. In “fanzine,” I don’t like the word “fan.” In fact, I don’t like fans. I don’t like stars. But I do like zines.

In English, they got rid of the prefix “fan,” and they use the word “zine” everywhere; it refers to different things. Can you tell us about this scene you call “graphic” and how it came about?

In my opinion, it was born from the American underground and underground music. It comes from the 1960s, with Crumb and all his gang and that kind of thing. Until the punk era, when graphics became much more violent, innovative, and neo-expressionist, that was linked to the music, whether it was No Wave or… I came to drawing and publishing through music. At first, it was concert posters. As soon as your design was a little different, it was logically associated with a style of music. There are many artists I publish who are also musicians, who have side projects. To me, it’s actually the same thing. It’s always linked to a musical universe.

Then what kind of content can we find in the books of Le Dernier Cri?

We find life. Life is sex, death, and flesh. Sometimes vegetables and stories. Sometimes it becomes unreadable; although it’s always figurative, they are images close to the expressionist spirit, or close to Dadaism and photomontage. We publish people who are heirs to Heartfield, Kirchner, or George Gross. And people who have sensibilities close to the graphics of outsider art. Sometimes it’s like degenerate comics, or it can be degenerate art for some. I would say it’s degenerate art.

Hahaha! That’s easier. Others took care of defining degenerate art for us. And what about the relationship with violence? What is the relationship between graphzines and violence? Is it part of the aesthetics of graphzines?

Not all of them are violent. Sometimes it’s graphically violent. That’s why I was talking about the musical dimension. It’s the same energy as punk music, free jazz, or noise. It’s like musicians who draw; our aesthetic is like that. We think it’s violent; for them, it’s normal. It has energy. An energy that calls for the stroke, the layout, and the colours used. It’s like a distortion pedal. I would say that Le Dernier Cri is a distortion pedal plugged into a photocopier. That’s what it is. It’s a transformation of an image by humans who redraw it, who revomit it, and who mess with it. Often, it’s reactions to images that we’re fed, suffocated by the media or advertising. And it’s spit out; it’s revomited. For me, it becomes interesting because we go to the essential, and it becomes beautiful. It sublimates a thing, or it makes it disappear, because often you should just make fun of it.

So the distortion of the page that we often see in your publications is like the distortion of a punk guitar.

Yes, it is. It’s a bit like Clockwork Orange, when they clean the guy’s brain, they open his eyes and pelt him with images. My goal as a publisher is to do that. That’s what I do. I do that to brainwash people, too. That’s why the slogan of Le Dernier Cri is “Vomit with your eyes.” Because when you vomit, afterwards you are cleansed; you have rid your body of toxic things.

And how do you work, then? You said it was a collective at the beginning?

As I was in Paris at the beginning, there were several artists who gravitated around the bookshop Un Regard Moderne. Most of them were making photocopied books, and from the moment when I had the silkscreen printshop, we automatically found ourselves working together, printing books together. That’s it. After that, I started to publish foreign artists I didn’t know, to whom I would send the books and who would send me their drawings. Daisuke Ichiba, for example, would send me his drawings. I had never met him. Then he came to France; he came to see us, and we started working together. He did a residency here [at the Belle de Mai]. And that’s how, little by little, the network grew. So, I can’t say that it’s a collective in the sense that not everyone is there working all the time. But I try to get people to come and make the books with me. Afterwards, as the printing process is the same, it is often me who does the colouring because the artists are not there or they don’t know how screen printing works. There is a common aesthetic to the publishing house because of the artistic dictator and the printing process.

That’s it! That’s the situation I’m interested in personally; it is the idea of an artist-publisher. Is there a personal touch to all of Le Dernier Cri publications? Do you consider Le Dernier Cri to be an artwork in itself?

Ah, well, of course! I don’t want to be frustrated by spending my time doing only my own stuff. Years ago, in Paris, I was only doing things by me, and for me, I got really fed up.

But at that point, do you take the authors, digest them according to the process you described earlier, or do you revomit them?

Or we vomit together, or they let me do my thing. There are people who want to make a book with me because they anticipate that there will be an interpretation and that there will be things they wouldn’t have thought of themselves.

So they accept that it’s going to go through your filter and your way of working. Do you think it’s a common thing, this way of working, that the editor puts his hand in so much?

I don’t think there are that many publishers who own their production tools. When you make a mock-up and send it to be printed somewhere, it’s not the same as when you make a book; when you print it and fold it, you can invent different formats. Coming back to music, it’s like if you decide to go and record in such and such a studio with such and such a producer. You trust the producer. That’s the spirit. That’s what you like, and that’s what you want to try.

And what role does craft play in this? silkscreen printing?

Well, it’s not really playing; it’s more like hell. In terms of colours, it allows you to have spot colours. There are constraints; you can’t do the same thing as when you print a book in offset. So the constraints become an aesthetic.

And in the way you work, do you pay particular attention to technique? I mean, by now you’re probably just so used to it that the technique is part of…

Yes, you have to be careful. And sometimes you have to interpret people’s work because the silkscreen process won’t work otherwise. It really needs to be an interpretation. For example, when it’s photomontages or photos and you print them in silkscreen, you’ll never get the result you get with photocopy. You have to rasterize the images; you have to do something differently. It produces an aesthetic that needs to be mastered.

You have your own means of production on site, but have you worked with anything other than silkscreen printing? Photocopy, at first?

Photocopy, yes. Then offset. I work with a small local printer, so I can mix offset with screen printing. It’s a small printer, so it’s not big four-colour machines, it’s colour after colour. Then it’s like screen printing, but offset, and then I can print photos.

Okay, so you can do small print runs with him that you couldn’t do with a bigger offset printer.

The offset workshop is already quite big; it’s never open, so we might as well do a spot colour. Each time, you have to clean the machine. With 4 colour machines, if you want to do a spot colour for 500 copies, they’ll charge you a lot. Or they do it in four colours because they run their machine in four colours. If you send a file in black and white, it won’t be a real black and white; it’s a black and white four-colour. So, you might as well do it in black and white in photocopy; if you have a good black and white photocopier, it’s better.

And for the books, you were talking about 500 copies; do you do that with this offset printer?

I only make books myself in 200 copies. The most I’ve printed is 2000 copies in offset. I’ve never printed more than 2000 copies in total.

What was it?

That was Charles Burns, the Tintin in the invented alphabet. But there is no more. I liked the artists that you could find in RAW in the early 1980s. Like Panther, Burns. So I tried to do projects with them afterwards. I had contacted Burns to do a book over 10 years before. I had done an interview with him years ago for a magazine, like what you’re doing now. Years later, all of a sudden, he sends me a book project. It was the first book I did with him. It was like a sketchbook, where he was redrawing images from old comics. And five years later, he sent me this book. Because he was putting out a book with Cornelius, he asked me to do a pirate edition, like the fake Chinese Tintins.

…and in an invented alphabet. Is that supposed to be the alphabet of something?

No, no, no, it’s totally fake. People have tried to translate it, but there is no story.

It’s just decoration then?

Yeah, yeah. He’s a vicious one.

And he didn’t want to make it look like an alien alphabet either; it looks a bit like the alien alphabets you see in Futurama.

Yes, or it’s fake Thai. It’s like a fake Tintin printed in an Asian country.

Yes, that’s what Thai looks like to Charles Burns.

Yes. Anyway, it’s nice, graphically, the Thai alphabet.

I wanted to ask you about your relationship with comics. When I explain to people what a graphzine is, I say it looks like illustration and comics, but it’s neither.

Well, it can be comics. But in reality, it’s not really comics. They’re reprocessed comics.

Yes, they do not necessarily tell a story.

They do tell a story because comics are sequential; from the moment you put one image behind another, you are already telling a story. Even a picture book tells a story. It’s a kind of cut-up practice in images. We reprocess the image, whether it’s in photomontage or in drawing. We regurgitate stuff. And so it can be images taken from a film that we rework or comics that we rework. In short, it’s like a collage.

I guess that this kind of thing must be very badly seen in the comics world? They must hate it, don’t they?

Well, yes. They’re starting to open up a little bit to that, but then, in the comic book world, you know what it’s like. There are comic book editors who are sensitive to graphics. For me, it’s really a graphic designer’s job; it’s drawing. Afterwards, it’s certain that in the conventional comic book world, it makes their hair stand on end.

What about the connection with illustration? There must be artists you work with who also work as illustrators…

Yes, there are.

But they won’t consider what they’re doing with Le Dernier Cri in the same way?

The people who propose books, or to whom I propose to make books, are making a book that they might not normally be able to do with a big publisher. There would be no point in me doing the same thing they could do with a big publisher. We come back to the notion of the “book object,” because in a print run of a thousand copies, each book is almost unique. Each book is almost an original; that’s how I see it. I studied fine art, but I’m not necessarily interested in unique works. What interests me is the multiple, well, not millions of copies, but the possibility of reaching more people even with silkscreen prints in 500 copies, which I sell for €50. I don’t want to sell things that are too expensive.

Yes, yes, that’s what I was going to ask you. Because you could very well sell them for three times as much.

But I come from the punk music scene. I come from Do It Yourself.

So it’s important to you that they are cheap, affordable.

It’s important to me that I can afford it. Or, if I were younger and I came across this, if I fell in love with it, I could buy it. Because when I fall in love with contemporary artists, I can’t buy them, not even a print. Because it’s very expensive and because it’s a market, which sometimes I find a bit ridiculous. But that’s how it is. But even if I make cheap books, there are still people who speculate on them. I’ve seen books from Le Dernier Cri that are worth a fortune.

Yes, that’s it. I am sure I could find the Charles Burns book, but it would be extremely expensive.

That’s it. And there are books that cost a fortune on Ebay while they’re still available at Le Dernier Cri. Well, if people don’t make the effort to look for things…

Yes. It means that they want people to take their money.

Yes, yes. They want to go and buy it in a gallery because, for the moment, it has value because it was bought in such and such a place, but no. The value is the value of the object.

So they are rare, but not necessarily precious?

Uh, they’re all precious. They’re cheap. They become expensive when people collect them when they are out of stock. Like everything else.

Le Dernier Cri
'L'atelier de sérigraphie et espace d'exposition du Dernier Cri à la Belle de mai, Marseille, 2016.' 'Le Dernier Cri's printshop and exhibition space, Marseille, 2016.'
Gaki Deka
Pakito Bolino Kerozen, *Gaki Deka*, Marseille, Le Dernier Cri, 2002, 12.5 x 12.5 cm, Sérigraphie, 14 pp Pakito Bolino Kerozen, *Gaki Deka*, Marseille, Le Dernier Cri, 2002, 12.5 x 12.5 cm, Screen Printing, 14 pp
Couscous Sardine
Caroline Sury, *Couscous Sardine*, Marseille, Le Dernier Cri, 2001, 16 x 21 cm, Sérigraphie, 60 pp Caroline Sury, *Couscous Sardine*, Marseille, Le Dernier Cri, 2001, 16 x 21 cm, Screen Printing, 60 pp
Hopital Brut 4
Caroline Sury, *Hopital Brut 4*, Marseille, Le Dernier Cri, 1999, 21 x 29,7 cm, Sérigraphie, 280 pp Caroline Sury, *Hopital Brut 4*, Marseille, Le Dernier Cri, 1999, 21 x 29,7 cm, Screen Printing, 280 pp