Par email,
le 7 novembre 2016
En général, j’explique un ou deux projets spécifiques et je n’essaie pas de décortiquer toutes les différentes façons dont je travaille, ni d’expliquer toutes les diverses formes que ma pratique artistique a pu prendre. Je préfère avoir une conversation sur une seule chose plutôt que de submerger quelqu’un avec trop de choses différentes. J’ai l’habitude de faire des conférences sur mon travail d’une manière similaire : en parlant plus en détail de 5 projets en une heure, plutôt que d’essayer de faire un travail de merde en couvrant 15 projets. Je ne fais pas d’art qui soit spécifiquement en réponse à d’autres formes artistiques que seul un initié pourrait comprendre. Tout ce que je fais a une sorte de sujet ou d’intention qui peut être compris par des personnes qui n’ont pas de diplôme en art ou en histoire de l’art. J’évite d’utiliser le jargon et le name-dropping. Je ne me soucie pas vraiment non plus de savoir si quelqu’un ne veut pas voir ce que je fais comme de l’art. S’ils peuvent comprendre de quoi parle une œuvre par un autre biais, c’est très bien. Selon le projet, on m’a aussi considéré comme un curateur, un activiste, un documentariste ou un journaliste. J’ai fait mes études dans le domaine de l’art, mais je suis très heureux que mon travail circule d’autres façons, et pour y parvenir, il faut pouvoir parler de ce travail sans dépendre du langage et des références du monde de l’art.
Oui, notamment dans mon travail avec Brett Bloom et les autres collaborateurs de Temporary Services. Nous avons produit des installations, des vidéos, des photographies, des sites Web, des performances, des événements, des expositions, des objets sculpturaux, des projets publics temporaires et d’autres formes. Public Collectors est principalement axé sur la plateforme en ligne, les événements, les expositions et les publications. J’enseigne également, ce qui peut parfois être interprété comme une extension de ma pratique artistique.
C’est de moins en moins fréquent. Mon livre Délivrance : Writings on Postal Relations (Soberscove Press, 2014) est un exemple de quelque chose qui ne rentre dans aucune des deux catégories. Ce livre, qui raconte mes expériences avec plusieurs bureaux de poste sur une période de quatre ans, est certes lié à mon travail avec Temporary Services et notre maison d’édition Half Letter Press, mais je l’ai écrit par moi-même. Parfois, je suis invité à contribuer à des lectures d’autres personnes ou à des types de projets participatifs et je le fais sous mon propre nom. Dernièrement, j’ai eu tendance à créer de nouveaux projets (comme Hardcore Architecture et Library Excavations) qui me semblent toujours adaptés sous la bannière de Public Collectors, même s’ils comprennent plusieurs publications, événements et expositions.
C’est une partie naturelle de mon travail. Chaque plateforme de présentation s’accompagne de différentes possibilités, limites, opportunités et défis. J’aime les collaborations qui se produisent lorsque tu fais des expositions avec différentes personnes, que ce soit dans la maison de quelqu’un ou dans un musée. J’aime toute la communication qui a lieu avant une exposition, être sur place, voyager dans d’autres villes, et pouvoir voir directement comment le public réagit.
Je considère toutes les opportunités d’une manière non hiérarchique. Elles ont toutes du mérite, elles doivent toutes être prises au sérieux et elles doivent toutes être traitées comme importantes, que 10 personnes y assistent ou que 100 000 personnes y assistent. Cela dit, plus de 120 000 personnes ont vu la Biennale du Whitney en 2014 et beaucoup plus ont découvert l’œuvre en ligne ou par le biais d’articles publiés. J’avais quelques réserves quant à ma participation, car la mission de Public Collectors est de travailler avec le genre de matériaux dont les musées ne se soucient pas. Je déteste aussi vraiment la façon dont le monde de l’art considère la Biennale comme une occasion de spéculer sur la valeur commerciale de tout et de tous ceux qui y sont inclus. Je n’ai jamais été intéressé par le fait de faire partie du monde des galeries commerciales et des expositions comme la Biennale du Whitney sont liées à ces façons de penser et de fonctionner.
Le curateur avec lequel j’ai travaillé, Anthony Elms, est quelqu’un que je connais depuis plus de 20 ans. Nous avons collaboré par le passé et sommes très bons amis, j’étais donc sûr que travailler avec lui serait une excellente expérience, et ça a été le cas. Il a été un ardent défenseur de mon travail lorsqu’il s’agissait de traiter avec le musée et, vraiment, le personnel du Whitney a été formidable.
En fin de compte, j’ai décidé de participer, mais j’ai créé un ensemble compliqué de règles pour moi-même sur ce que mon projet devait être et comment il devait fonctionner et ce que je voulais retirer de l’expérience. Pour des raisons de temps et d’espace, je garderai cette longue explication pour un autre jour. J’ai décidé de me concentrer sur la vie et la mort de Malachi Ritscher, une personne qui n’aurait jamais été présentée au musée sans mon intervention. Ritscher était une personne créative d’un genre particulier. Il assistait de manière obsessionnelle aux concerts de musique improvisée et expérimentale et les documentait consciencieusement, il partageait cette documentation avec les artistes eux-mêmes, il prenait des photos, il cultivait des piments et fabriquait sa propre sauce piquante, il écrivait, faisait de l’art visuel, il tenait à jour un calendrier culturel en ligne contenant des listes d’événements musicaux et autres, et c’était un ardent militant anti-guerre. Il est mort en 2006 en s’immolant en public, en protestation contre l’invasion de l’Irak par les États-Unis.
Très peu de choses ont été écrites sur Ritscher depuis sa mort, mais un grand travail d’archivage a été réalisé pour préserver les enregistrements audio qu’il a faits. Ce travail est mené par Creative Audio Archive des Experimental Sound Studios à Chicago. Entre autres choses, je voulais que mon projet pour la Biennale rafraichisse la mémoire sur l’histoire et l’exemple de Malachi, et que plus de gens aient connaissance de ce qu’il a fait. La plupart de ce qui a été écrit sur Malachi en 2006 s’est concentré sur l’aspect dramatique de son suicide et la façon dont les médias ont évincé la dimension politique de son geste. Je voulais également explorer ces questions, mais aussi mettre en avant les autres aspects de sa généreuse pratique documentaire au service des artistes, et le rôle essentiel que certaines personnes jouent dans toute sorte de communauté créative, en faisant un travail qui se déroule en dehors des projecteurs.
Le projet a été réalisé en collaboration avec de nombreux amis de Malachi Ritscher, ainsi qu’avec sa famille. Ils m’ont parlé lors d’interviews et ont généreusement prêté des objets pour l’exposition. La participation de Creative Audio Archive a également été essentielle. Avec l’autorisation des artistes, ils ont permis de faire entendre dans l’espace de l’exposition des extraits audio de plus de 50 concerts enregistrés par Malachi. Le long essai que j’ai écrit sur Ritscher reste en ligne et peut être lu ici : http://www.publiccollectors.org/Malachi_Ritscher_Whitney.pdf.
By email,
November 7th, 2016
Usually, I explain one or two specific projects and don’t try to untangle all of the different ways I work or explain all of the various forms my art has taken. I’d rather have a conversation about one thing than overwhelm someone with too many different things. I usually lecture on my work in a similar way, talking in more detail about 5 projects in an hour rather than trying to do a shitty job covering 15 projects. I don’t make art that is specifically in response to other art that only an insider could understand. Everything I do has some kind of subject or intention that can be comprehended by people who don’t have a degree in art or art history. I avoid using jargon and name-dropping. I also don’t really care if someone is unwilling to see what I do as art. If they can understand what the work is about in some other way, that’s fine. Depending on the project, I’ve also been called a curator, an activist, a documentarian, or a journalist. My schooling is in art, but I’m very happy for my work to circulate in other ways, and part of making that happen means being able to talk about the work without depending on art world language and references.
Yes, particularly in my work with Brett Bloom and other collaborators in Temporary Services. We’ve produced installations, videos, photographs, websites, performances, events, exhibitions, sculptural things, temporary public projects, and other forms. Public Collectors is mainly focused on web-based work, events, exhibitions, and publications. I also teach, which can sometimes feel like an extension of my art practice.
It is increasingly uncommon. My book “Deliverance: Writings on Postal Relations” (Soberscove Press, 2014) is an example of something that doesn’t fit in either category. That book, about my experiences dealing with several post offices over a period of four years, certainly comes out of my work with Temporary Services and our publishing imprint, Half Letter Press, but it is self-authored. Sometimes I get invitations to contribute to other people’s reading events or other kinds of participatory projects, and I’ll do something under my own name. Lately, I’ve been tending towards creating new projects (like Hardcore Architecture and Library Excavations) that still feel appropriate to present under the Public Collectors banner, even when they include multiple publications, events, and exhibitions.
It’s a natural part of my work. Every presentation platform comes with different possibilities, limitations, opportunities, and challenges. I enjoy the collaborations that happen when you make exhibitions with different people, whether it’s in someone’s house or in a museum. I like all of the communication that happens before an exhibit, being on site, often travelling to other cities, and being able to see first-hand how an audience responds.
I view all opportunities in a non-hierarchical way. They all have merit, they all should be taken seriously, and they all should be treated as important, whether 10 people attend or 100,000 people attend. That said, over 120,000 people saw the Whitney Biennial in 2014, and many more experienced the work online or through published articles. I had some reservations about participating because the mission of Public Collectors is to work with the kind of materials that museums don’t care about. I also really hate the way that the art world regards the Biennial as an opportunity to speculate on the commercial value of everything and everyone that is included. I’ve never been interested in becoming part of the commercial gallery world, and shows like the Whitney Biennial are tied up in those ways of thinking and operating.
The curator I worked with, Anthony Elms, is someone I have known for over 20 years. We have collaborated in the past and have a close friendship, so I felt confident that working with him would be an excellent experience, and it was. He was a great advocate for me when it came to dealing with the museum, and really, the staff at the Whitney were wonderful.
Ultimately, I decided that I would participate, but I created a complicated set of rules for myself about what my project should be, how it should function, and what I wanted to get out of the experience. For the sake of time and space, I’ll save that long explanation for another day. I decided to focus on the life and death of Malachi Ritscher, a person who would never have been featured in the museum without my intervention. Ritscher was a complicated kind of creative person. He obsessively attended and seriously documented concerts of improvised and experimental music; he shared that documentation with the artists themselves; he took photographs; he grew hot peppers and made hot pepper sauces; he wrote; he made visual art; he maintained a cultural calendar website of music and other event listings; and he was a very outspoken anti-war advocate. He died in 2006 when he took his own life by immolating himself in public as a protest against the United States-led invasion of Iraq.
Very little had been written about Ritscher since his death, but there has been a great amount of archival work being done to preserve the audio recordings he made. This is being carried out by the Creative Audio Archive at Experimental Sound Studios in Chicago. Among other things, I wanted my project for the Biennial to essentially hit the refresh button on Malachi’s story and example and to make sure more people knew about what he did. Most of what was written about Malachi in 2006 focused on the dramatic aspect of his suicide and the way that the media suppressed the politics of his action. I wanted to explore those issues as well, but I also wanted to highlight the other aspects of his generous documentary practice in service to artists and the critical roles that certain people have in any kind of creative community, doing work that happens outside of the spotlight.
The project was a collaboration with many friends of Malachi Ritscher, as well as his family. They spoke to me for interviews and generously lent objects for the exhibit. The participation of Creative Audio Archive was also critical. They, with permission from the artists, allowed audio from over 50 concerts recorded by Malachi to be heard in the exhibit. The long essay I wrote about Ritscher remains online and can be read here: http://www.publiccollectors.org/Malachi\_Ritscher\_Whitney.pdf