Paris,
le 16 mai 2022
A : Je sortais de prison [Rires], et elle, elle faisait des trucs, des trucs bizarres, en Irlande [Rires]. D : Je vivais dans une ferme de moutons en Irlande, voilà. A : Oh oui, c’est vrai, avec d’anciens membres de l’IRA. D : C’était un peu ça, oui. A : Mais ça se fait qu’on s’est rencontrées à Venise, [rires] à Paris ? On s’est rencontrées au Pérou, non ? D : C’était au Pérou, oui. A : Oui, j’allais faire du ski là-bas, parce que je viens d’une famille française un peu bourgeoise. On passait beaucoup de temps à skier, c’est vrai, en Suisse, au Pérou, au Canada. D : On est allées skier une fois au Canada.
A : L’argent, c’était de l’argent.
A : Oui, mais c’était surtout l’argent, parce qu’on était payées pour le faire, croyez-le ou non. C’était un travail payé de faire Housewife, pour un club appelé Le Pulp, qui s’appelait à l’époque L’Entracte. Et la patronne, Michelle avait une vision. Elle pensait qu’en donnant aux artistes la liberté, ça créerait une « image de marque » pour le club. Elle nous a donné beaucoup d’argent pour le faire. D : 6000 francs par mois, c’était beaucoup. Bureau gratuit, champagne gratuit… A : et cocaïne gratuite. Alors, on a acheté un ordinateur, un énorme ordinateur qui ressemblait à un réfrigérateur. D : C’était comme le premier ordinateur jamais fabriqué avec un écran couleur. Je pense que c’était un Gateway 2000.
A : 1997, probablement ou 1996. On s’est rencontrées en 1995 au Pérou, près du Machu Pichu ? D : Oui, ça ne s’appelle plus comme ça d’ailleurs. A : OK, c’est un autre sujet.
A : Premier ou deuxième numéro, Voyons voir, [Elle parcourt les numéros] celui là, c’est le cinquième numéro, et il est écrit « Le Magazine du Pulp ».
D : Qui a créé le contenu ? Je ne sais pas, Qu’est-ce que t’en penses ? A : C’est difficile de parler de nos séances de brainstorming. Il y avait beaucoup de séances de différentes choses [Rires].
D : On essayait de tout faire passer par un filtre lesbien, n’importe quelle situation, par exemple le rap East Coast vs West coast. Imaginez Janet Jackson tirant sur Whitney Houston dans la tête après un clash. C’est ce qu’on nous a demandé de faire, je veux dire. Si on m’avait demandé de parler de caniches, je l’aurais fait.
D : C’était comme une exploration anthropologique, on étudiait la faune. A : On étudiait les lesbiennes, totalement.
A : Oui, et j’ai continué après dans Têtu. Dans ma chronique, j’ai étudié les lesbiennes pendant 10 ans et elles m’ont détesté pour ça. C’est vrai, elles ne m’aimaient pas vraiment.
A : Le Pulp a duré 10 ans, donc la première époque du Pulp, c’était essentiellement composé de lesbiennes. Les hommes étaient les bienvenus, mais en petit nombre. C’était un coin lesbien très bric-à-brac. Aujourd’hui, on pourrait pas avoir un club comme celui-là ; l’endroit lui-même était complètement à l’abandon. C’était un ancien théâtre sur les Grands Boulevards, un thé dansant pour personnes âgées l’après-midi. On y est arrivées en tant que groupe d’amies, mais on n’avait aucune idée, aucun savoir-faire sur la façon de gérer un club sexy comme les gens font maintenant. C’était fou. Un soir, c’était la soirée Tortilla Patata, un autre, la soirée Soupe à l’oignon, ou encore la soirée Spaghetti Zuchini. On mettait de la musique et les filles se draguaient. Et bien sûr, il y avait déjà beaucoup de drogues à cette époque, ce qui rendait les choses encore plus folles. C’était très drôle.
A : Pour la soirée Tortilla Patata, Michelle faisait de la tortilla espagnole. D : Et il y avait des saucisses. T’imagines aller dans un bar pour draguer quelqu’un et il y a des saucisses à l’ail sur le comptoir ! Une chose que les lesbiennes aiment, c’est les trucs gratuits. Donc, pendant qu’elles faisaient la queue pour leur bière, elles mangeaient des saucisses. C’était insupportable, insupportable. De l’haleine d’ail partout. A : Mais c’était un concept. Regarde, maintenant on sert de la bouffe partout ! D : Non, ça a marché. Tout le monde fait de la putain de bouffe maintenant. A : Maintenant, les gens proposent des boissons et des sushis. On était en avance sur notre temps. D : Pas nous, Michelle était en avance sur son temps. A : On n’avait pas fait de sushi, on avait des saucisses. [Rires] Ce qui est logique pour des lesbiennes. Allo ! Ça se passe de commentaire.
A : C’était censé être un agenda. Il y avait beaucoup de soirées parce que le Pulp était ouvert presque tous les jours de la semaine à une époque. Alors imagine la quantité de flyers qu’il fallait faire pour un mois. C’était fou. D’abord, elles voulaient un agenda, puis on a proposé différents sujets pour en faire un magazine. D : Le seul format auquel on devait se tenir était celui de la carte postale, car c’était pas cher. On devait avoir une page pour chaque sponsor. On devait garder deux pages pour l’agenda. A : Le sponsor à l’époque, c’était le Minitel. D : On était obligées de mettre un horoscope, jusqu’à ce qu’on se batte contre ça.
A : C’était mon rôle. J’ai toujours été très autobiographique.
A : Parce que on était des amies très proches. [Rire] Et on passait nos vacances ensemble, on partageait parfois le même appartement, on travaillait ensemble, on avait des amis communs.
A : Et un intérêt pour les cow-boys et les armes à feu, c’est moi ici sur la couverture [du numéro 5]. C’est la fois où on est parties en vacances ensemble. C’est notre été indien au Canada.
A : Oui, mais elle a fait ça avec une autre amie, pas avec moi. D : Une de nos règles du jeu, c’était de dire la vérité sur nos relations. Donc, si on était de mauvaise humeur, on le mettait dans le magazine, si on était de bonne humeur, on le partageait.
D : Oui, et on a payé l’argent à la gagnante.
A : Non, car la gagnante a gardé toutes les idées pour sa carrière artistique. D : Je pense qu’elle a pu faire une page dans un des numéros. Mais on a été payées 6 000 francs pour faire un magazine vide.
D : On l’a fait. C’était tellement cool pour un fanzine de pouvoir donner de l’argent.
A : C’est la beauté de la chose d’avoir été payé pour le faire. On a fait le seul fanzine au monde qui était payé. Notre patronne était soit une visionnaire, soit une personne complètement folle.
D : Je ne savais même pas ce qu’était un fanzine. A : Oh, allez. D : Non, vraiment. Je pouvais en avoir déjà vu un honnêtement. De ce type qui bégayait. Ça s’appelait Stutter. A : On utilisait le mot « magazine », c’est écrit sur la couverture « Le magazine du Pulp ». D : C’est venu après, quand les gens l’ont appelé comme ça.
A : Je suppose que oui. Parce qu’on était payées, on avait appelé ça un magazine. D : Honnêtement, je ne savais pas ce qu’était un fanzine ; je ne savais pas que c’était un truc, vraiment.
A : Oui, oui, oui, il n’y avait pas de conception de quoi que ce soit, c’est parce que je ne savais pas comment utiliser un ordinateur. D : On n’en avait jamais utilisé avant. A : Mais tu étais un peu meilleure que moi. Je faisais comme ça parce que je suis super mauvaise pour taper. Donc, on a engagé des esclaves en fait. J’écrivais tous mes articles à la main et puis j’engageais une fille que je ramassais dans un club. Soit je couchais avec elle, soit je lui versais un peu d’argent. D : Tes souvenirs sont toujours intéressants. A : Il y avait une fille qui était amoureuse de moi et qui aurait fait n’importe quoi pour moi. Donc elle tapait pour moi au bureau. Mais c’est à ce moment-là que Dana et moi on s’entendait plus, alors on a commencé à faire des numéros séparés. On faisait chacune un numéro sur deux. Pas pendant longtemps, parce qu’après, j’ai arrêté. À un moment donné, il y avait cette fille qui corrigeait mon orthographe, parce que je suis très mauvaise en orthographe et que je ne sais pas taper à la machine. Enfin, je savais pas à l’époque. Quand je ne trouvais personne, je devais le faire moi-même. Alors, je prenais ma vieille machine à écrire et je faisais ce style avec de la colle, des crayons de couleur et des photocopies. Ça donne l’impression que c’est un fanzine, mais quand même. D : On travaillait aussi sur Corel Photo Paint, dans lequel on devait taper le texte comme un objet et si on faisait une erreur, tout disparaissait. On perdait le fanzine une quinzaine de fois, on frappait dans les murs bourrées, puis on devait sortir quelque chose parce qu’on avait une date limite, on était payées, on devait vraiment le faire. A : Mais c’était aussi très inspirant parce que Dana est aussi une personne merveilleusement créative, tous ses journaux ou agendas ressemblent à ça. On a été très inspirées par ton style. D : Tu lisais mon journal intime ? A : Non, parfois tu me montrais. D : Je ne t’ai jamais montré. A : Tu me montrais parfois. Je frappais à la porte et tu le fermais précipitamment. Elle me mettait à la porte de la maison, de ma propre maison, pour pouvoir écrire avec de l’espace et du calme. Elle passait des journées entières à écrire son journal intime.
A : Je suppose que ça ressemble à un fanzine. On appellerait ça un fanzine de nos jours. Je suis sûre qu’il y a aussi des gens qui sont payés pour faire des fanzines.
A : C’est la meilleure couverture. [Elle montre le numéro 12] La meilleure idée de Dana Wyse pendant toutes ces années, c’est de faire une couverture avec des cheveux. À ce jour, c’est ma couverture préférée.
D : Elles ont été créées en même temps. Tout s’est passé en même temps.
D : On envoyait les Housewife. Les timbres et les enveloppes étaient payés. Et le tirage était de 2 000 exemplaires, donc on avait un public immédiat de 2 000 personnes. C’était une occasion parfaite de faire de l’autopromotion. Mais ça rendait aussi l’objet, la publication, quel que soit le nom de ce putain de truc, plus intéressant parce que ça parlait de nos vraies vies. Ce qu’Axelle et moi on vivait, ce qu’on faisait professionnellement. A : En référence aux pilules, on avait fait un flyer d’invitation pour une soirée Housewife. On a pas fait beaucoup de soirées Housewife, peut-être quatre, mais celle-là, c’était la première. Comme j’avais une petite dépendance, j’avais toujours beaucoup de pilules chez moi, et on a eu l’idée de faire un micro-flyer dans une capsule. D : C’était un excellent flyer. A : On allait dans les clubs pour distribuer les capsules aux gens et le flyer était à l’intérieur. C’est à peu près à cette époque que Dana a commencé à faire les petits sachets de pilules. D : J’ai commencé à faire des petits paquets quand tu avais ton magasin d’antiquités. Elle tenait une boutique vintage et je pouvais y tester mes idées. A : Tu as fait le petit cœur en premier. D : J’ai fait le cœur, mais aussi des tours Eiffel miniatures. J’ai fait des sachets de cheveux d’Elvis, d’Andy Warhol parce qu’elle avait cette boutique cool et que je pouvais tester les produits sur son public. A : Je me souviens être allée au Rex Club en me sentant si cool parce que j’avais ma poche pleine de pilules que je distribuais. Mais le truc, c’est qu’avec la chaleur, les capsules fondaient parce que je dansais beaucoup. J’étais à fond dans la danse, et plus je dansais, plus les capsules fondaient et se collaient dans ma poche, et à la fin, ce n’était plus une si bonne idée.
A : Tout dans notre vie à cette époque était une excuse pour la créativité. Et Housewife était essentiellement notre terrain de jeu. On se levait le matin, on commençait à avoir des idées, à travailler, à voyager et à rencontrer des gens, et tout ce qu’on rassemblait devenait quelque chose de créatif. D : Quand j’avais une expo à Moscou ou au Canada, je pouvais faire Housewife là-bas. Quand tu étais à Hong Kong, tu pouvais en faire un là-bas. A : J’avais été engagée par un couple pour faire l’amour à Hong Kong. C’est vrai, mais j’y suis allé et soudain j’ai flippé. Donc, finalement, j’ai eu cette merveilleuse expérience avec des lesbiennes là-bas. Comme on ne m’a pas emmenée sur cette île pour faire du sexe, je suis restée à Hong Kong toute seule et j’ai rencontré une fille dans la rue. C’était très dangereux de faire du cruising à Hong Kong et il se trouve que la fille était lesbienne et qu’elle m’a emmené dans un club au sommet d’un immeuble où il y avait tous ces chinoises butchs en costume avec des lesbiennes girly girly girly. Ça m’a donné l’occasion de faire un reportage pour Housewife. Chaque situation était une occasion de remplir les pages.
A : Nos amours, nos amies dont on se moquait. Les gens ont commencé à se rapprocher de nous pour en faire partie, mais aussi pour travailler avec nous. On a découvert le talent de Tiphaine Kazi-Tani qui est un.e super écrivain.e. Iel n’avait jamais écrit auparavant et iel a écrit dans Housewife. D : Ouais, parce que certains des gens du Pulp avaient 16 ou 17 ans. A : On a découvert Sylvie Bardet, Sophie Anquez et qui d’autres ? D : Virginie Despentes. A : On n’a pas découvert Virginie Despentes ! D : Non, on a demandé à Virginie et on se moquait des tatouages d’Ann Scott. Il y avait tout un groupe Housewife et il y avait tellement de gens talentueux autour de nous. A : Qu’avait écrit Virginie Despentes ?
A : C’est la fameuse page en odorama. J’ai des photos de toi sur le sol avec ta petite brosse faisant toutes les couvertures. On faisait tout nous-mêmes, alors quand Dana a eu une idée brillante comme celle-ci, on l’a fait. On a mis de la pâte parfumée sur la photo de la chatte, de sorte que lorsque tu la grattes, tu peux sentir quelque chose. Tu avais choisi les odeurs ? D : Oui, je les avais commandées aux États-Unis. Il y avait essence, ail, cèdre ou cuir. A : Oui, le cuir était cool, mais on a dû faire les 2000 exemplaires nous-mêmes. Une autre fois, on avait inséré une feuille de papier toilette dans chaque exemplaire. On a aussi fait deux mille faux sachets de cocaïne.
D : Le procès A : Exactement, parle nous du procès ? D : Je ne dis rien parce que je suis sûre d’avoir signé un papier. Mais j’ai été accusée d’« incitation à la pédophilie » par une fille, et la police est venue me chercher au Canada pour un fanzine. Ils pensaient que j’étais une pédophile parce que j’avais fait une publicité pour « Avoir une fille lesbienne garantie ». Et la fille sur l’image m’a poursuivi en justice et l’une de mes défenses devant le tribunal pénal français était : « Qui voudrait avoir une fille lesbienne ? » Donc, évidemment, c’était une satire. A : Jésus ! D : Quand mon avocat a essayé de me défendre en disant que ça faisait partie d’un projet artistique, pour montrer ce que je pensais de la vie, il a commencé à brandir des pilules, mais l’une d’entre elles avait une croix gammée au dos, alors mon avocat l’a brandie. [Rire] C’était un vrai désastre. Mais on a gagné le procès.
D : Eh bien, je veux dire, ça a traumatisé la fille, c’était une situation horrible, et donc je ne vais pas en dire plus à ce sujet. Mais on a dû déchirer la dernière page de Housewife deux mille fois. A : Comment elle est tombée sur la fausse annonce, elle est venue au Pulp ? D : Par coïncidence de coïncidences. J’avais acheté l’image au Canada, mais elle venait de France, donc c’était juste fou que nos chemins se croisent. Mais c’était presque la fin du magazine aussi, parce que quand tu commences à avoir des procès pour un fanzine, c’est dangereux.
D : C’était le même problème, j’avais aussi des poursuites judiciaires pour les pilules aussi. Je recevais les lettres, ça en fait partie. Y a-t-il autre chose que tu aimerais savoir ? A : Ce numéro date de 1999. D : Je pense qu’il y a quelques numéros en 2000 et après, c’est la fin.
D : Je vais laisser Axelle répondre à cette question. A : Le Pulp était probablement l’une des dernières expériences nocturnes libres de l’ère pré-internet. Tout était du genre Do It Yourself et il n’y avait pas d’intention de devenir le meilleur endroit de Paris ou autre. C’est arrivé, il n’y avait pas de plan. C’était une nuit où l’on pouvait tout essayer, on ne se souciait pas de la rentabilité. Il n’y avait pas cette pression de faire de l’argent, d’être hype. Même si nous étions à la mode, parce que nous débordions de culture et de créativité. C’est scruté à la loupe, parce qu’aujourd’hui, la nuit doit être rentable et avoir l’air cool sur Instagram. Il faut être toujours au bon endroit. Le Pulp était parfois affreux, tu te retrouvais à 3h du matin, avec du mauvais alcool et des gens bourrés coincés dans un espace-temps affreux avec trois filles moches qui s’embrassent et dansent sur une musique nulle. Alors, un mec nu se présentait avec une tronçonneuse et faisait une performance au milieu de la nuit. On pouvait aussi tomber sur Nan Goldin et sa bande, comme dans la nuit underground de New York, San Francisco, Londres ou autre. Même avec le succès, ce sentiment d’underground est resté jusqu’à la fin. Housewife a marqué cette époque parce que les gens l’associent au Pulp et à sa liberté, comme lorsqu’on faisait une page presque illisible. Ça a duré 3 ou 4 ans de liberté et de créativité totales.
A : Rétrospectivement, le Pulp et Housewife ont changé la façon dont les lesbiennes étaient perçues par les gens, en particulier par les gays qui étaient vraiment maîtres de la nuit. Tout d’un coup, on est devenues branchées. Les gays étaient notre principale base de fans, à l’époque, on était le nouveau truc en ville. Avant le Pulp, au début des années 1990, les lesbiennes étaient considérées comme des filles chiantes, ennuyeuses, frustrées, toujours grincheuses. Quand on a eu les clés de cette boîte de nuit, on n’avait aucune idée de ce qu’il fallait en faire, et c’est là toute la beauté de la chose. C’est devenu notre terrain de jeu. Delphine, qui deviendra plus tard DJ Sextoy, venait d’acheter des platines et les installe dans le garage de sa mère. De mon côté, j’étais très inspirée par la scène BDSM anglo-saxonne, car je trouvais que les gars en cuir et chapeaux nazis étaient cools. Ça a été un tremplin pour beaucoup d’entre nous, car Michelle a su créer un climat de liberté totale pour nous. Pas seulement pour nous, mais pour toute une génération. Lorsque Kill The DJ a commencé à organiser des soirées au Pulp, au tournant du millénaire, celui-ci est devenu un laboratoire pour la musique électronique française. Des collectifs de partout ont commencé à venir essayer des trucs, à se rencontrer là. La French touch était déjà plus installée dans des endroits comme Le Queen, mais nous, on était le laboratoire qui a donné ses lettres de noblesse à la culture queer en France. Avant le Pulp, les gouines comme nous sortaient dans les boîtes de nuit du huitième arrondissement huppé, Le Memories, Le Garage. Ces endroits chics et chers, où il fallait s’habiller en conséquence et où l’on pouvait boire une coupe de champagne pour 100 francs, c’étaient ça la nuit lesbienne à ce moment-là. Ces endroits comme Le Katmandou à Pigalle appartenaient à une clique de lesbiennes de la vieille école, et il n’y avait pas d’endroits trash comme La Mutinerie aujourd’hui avec des filles portant des crètes, des cheveux colorés et des piercings. Lorsque Dana est arrivée à Paris en 1995, elle connaissait tous ces endroits et elle était choquée. D : Même les noms de ces endroits étaient complètement déprimants. A : Les dix ans du Pulp ont changé tout ça, alors que tout était complètement improvisé et qu’on devait aussi faire face au succès. À un moment, la queue dehors faisait 200 mètres et les gens attendaient 3 heures pour entrer. Et Christine et Mimi disaient aux garçons de se calmer et de laisser la place aux filles pour entrer. Mimi est peut-être la seule personne au monde à avoir refusé à Madonna qui voulait qu’elle privatise le club pour son after show à 2h du matin un samedi soir. Pour faire ça, il faut être soit fou, soit complètement défoncé, soit libre, et je pense qu’elle était complètement libre. Le Pulp était un espace qui n’a jamais perdu son autonomie.
Paris,
May 16th, 2022
A: I was out of jail [Laughs]; she was doing stuff, weird stuff, in Ireland [Laughs]. D: I was living on a sheep farm in Ireland; there we go. A: Oh yeah, it’s true, with ex-people from the IRA. D: That was sort of true, yeah. A: But how come we met in Venice? [Laughs] in Paris? We met in Peru, right? D: It was Peru, yes. A: Yeah, I was going to ski there because I’m coming from a kind of bourgeois French family. We were spending a lot of time skiing—it’s true—in Switzerland, Peru, and Canada. D: We did go skiing once in Canada.
A: Money; it was money.
A: Yeah, but it was money because we were paid to do it, believe it or not. It was a paid job to do Housewife for a club called Le Pulp, which was called at the time L’Entracte. And the boss, Michelle, had a vision; she thought that she would give artists the freedom to create an “image de marque” of this club. She gave us a lot of money to do it, right? D: 6000 francs a month, which was a lot. Free office, free champagne… A: and free cocaine. So we bought a computer—a huge computer that looked like a refrigerator. D: It was like the first computer ever made with a colour screen. I think it was a Gateway 2000.
A: 1997 probably, or 1996. We met in 1995 in Peru, near Machu Pichu? D: Yes, it’s not called that anymore, by the way. Okay, it’s another subject.
A: First or second issue, let’s see. [She looks through the copies.] That’s the fifth issue; it reads “Le Magazine du Pulp.”
D: What created the content? I don’t know; what do you think? A: It’s hard to talk about our brainstorming sessions. There was a lot of séances of different things [Laughter].
D: We also tried to run everything through a lesbian filter, like any situation, for example, East Coast v. West Coast rap. Imagine Janet Jackson shooting Whitney Houston in the head after a diss lyric. That’s what they asked us to do, I mean. If they had asked me to talk about poodles, I would have made it.
D: It was like an anthropological endeavour, studying the zoo. A: We were studying lesbians totally.
A: Yeah, and I continued afterwards in Têtu. In my column, I studied lesbians for 10 years, and they hated me for that. It’s true; they didn’t really like me.
A: Le Pulp lasted for 10 years, so the first part of Le Pulp was basically only lesbians. And the guys were welcome, but in a small amount. And it was a very bric-à-brac lesbian spot. Today, there wouldn’t be any club like that; the place itself was completely à l’abandon [dilapidated]. It used to be an old theatre on Les Grands Boulevards, a tea dancing for the elderly in the afternoon. We arrived in this as a group of friends, but we had no idea or preconception of how to run a sexy nightclub as people do now. It was crazy. One night was a Tortilla Patata night, another was the Onion Soup night, or a Zuchini Spaghetti night. We would put on music, and girls would hit on each other. And of course, there were already a lot of drugs at this time, which made things even more crazy. It was very funny.
A: For the Tortilla Patata night, Michelle would make Spanish Tortilla. D: And there were sausages. Can you imagine going to a bar to pick someone up and there’s like garlic sausage on the counter. One thing lesbians love is free shit. So as they were waiting in line for their beer, they would just eat sausages. It was unbearable, unbearable. Garlic breath everywhere. A: But it was a concept. Look, now food is everywhere! D: No, it worked. Everyone is doing fucking food now. A: Now people offer drinks and sushi. We were ahead of our time. D: We didn’t; Michelle was ahead of her time. A: We didn’t do sushi; we did sausage. [Laughter] Which makes sense for lesbians. Hello! It speaks for itself.
A: It was supposed to be an agenda. There were so many nights because the Pulp was open almost every day during the week at some point. So imagine the amount of flyers we were supposed to do for one month. It was crazy. First, they wanted to have an agenda, and then we proposed different topics to make it like a magazine. D: The only format that we had to stick by was postcard size because it was cheap. We had to have a page for whatever sponsor we had. We had to have two pages of agenda. A: The sponsor at the time was Minitel. [The Minitel was a French pre-Internet network] D: We were forced to put on a horoscope until we fought against it.
A: That was my part. I’ve always been very autobiographical.
A: Because we were very close friends. [Laughs] And we spent holidays together; we shared flats sometimes; we worked together; we had common friends.
A: And an interest in cowboys and firearms—that’s me right here on the cover [of issue #5]. That was the time we went on holiday together. That’s our Indian summer road trip in Canada.
A: Yeah, but she did that with another friend, not with me. D: One of the rules of the game was to tell the truth about our relationships. So if we were in a bad mood, we’d put it in the magazine; if we were in a good mood, we shared that.
D: They did, and we paid the money to the winner.
A: No, because the winner kept all the ideas for her art career. D: I think she got to do a page in one of the issues. But we got paid 6 000 francs to do an empty magazine.
D: We did. It was so cool for fanzine to be able to give money away.
A: It’s the beauty of it that we were paid to do this. We did the only fanzine in the world that was paid. Our boss was either a visionary or a completely mad person.
D: I didn’t even know what a fanzine was. A: Oh, come on. D: No, really. I might have seen one, honestly. From this guy who used to stutter. It was called Stutter. A: We called it a magazine; it’s written on the cover, “Le magazine du Pulp.” D: It came afterwards, when people called it that way.
A: I guess so. Because we were paid, we’d called that a magazine. D: I honestly didn’t know what a fanzine was; I didn’t know it was a thing, really.
A: Oui oui oui, there was no conception of anything; it’s because I didn’t know how to use a computer. D: We’d never used one before. A: But you were a little bit better than me. I was doing it this way because I’m super bad at typing. So we hired slaves, actually. I was writing all my articles by hand, and then I was hiring a girl I would pick up in a club. Either I had sex with her, or I paid her a little money. D: Your memories are always interesting. A: There was like a girl who was in love with me, and she would do anything for me. So she was typing for me at the office. But that’s when Dana and I couldn’t get along, so we started having separate issues. We would do individually every other issue. Not for a long time, because after that, I stopped. At some point, there was this girl who was correcting my spelling because I’m super bad at spelling and also because I don’t know how to type. I mean, I didn’t know at the time. When I couldn’t find anybody, I had to do it myself. So I would take my old typewriter and make this style with glue, colour pencils, and photocopy. That makes it look like a fanzine, but still. D: Also, we were working on Corel Photo Paint, in which we had to type the text in as an object, and if you made one mistake, it would all just vaporize. So we’d lose the fanzine like 15 times, so we’d be kicking walls drunk, and then we’d have to make something because we had a deadline, we were being paid, and we had to actually get it done. A: But also, it was very inspiring because Dana is also a wonderful journal creative person; all her journals or diaries look like that. We were very inspired by your style. D: Were you reading my diary? A: No, sometimes you were showing me. D: I was never showing you. A: You were showing me sometimes. I was banging on the door, and you would close it in a rush. She would kick me out of the house, of my own house, to be able to write with space and quietness. She spent days writing her diaries.
A: I guess it looks like a fanzine. It may be called a fanzine nowadays. I’m sure there are also people who are paid to do a fanzine.
A: This is the best cover. [She’s showing issue #12] The best idea Dana Wyse had during all those years was to make a hair cover. To this day, that’s my favourite cover.
D: They were created at the same time. It was all happening at the same time.
D: We were allowed to mail out the Housewifes. The stamps and envelopes were paid for. And the print run was 2 000 copies so you had an instant audience of 2 000 people. So it was a perfect opportunity to do self-promotion. But it also made the object—the publication, whatever that fucking thing is called—more interesting because it was about our real lives. What Axelle and I were living, what we were doing professionally. A: As a reference to the pills, we did an invitation flyer for a Housewife party. We didn’t do a lot of Housewife parties; we did only maybe four, but that was the first one. Because I used to have a little addiction, I always had a lot of pills at my house, and we had this idea of making a microflyer to put inside a capsule. D: It was a great flyer. A: So we would go to clubs and give a capsule to people, and the flyer was inside. It was approximately at this time that Dana was starting to do the little package of pills. D: I started doing little packages when you had your antique store. She was running a vintage store, and I could test my ideas. A: You did the little heart first. D: I did the heart, but I was also making miniature Eiffel towers. I did Elvis hair and Andy Warhol hair because she had a cool shop and I could test out the products on her public. A: I remember going to the Rex club feeling so cool because I had my pocket full of pills and giving them away. But the thing is: with the heat, the capsules were melting down because I was dancing a lot. I was all for the dance, and the more I danced, the more capsules were melted and glued into my pocket, and at the end, it was not such a great idea.
A: Everything in our lives at this time was an excuse for creativity. And Housewife was our playground, basically. We were waking up in the morning, and we were just starting to have ideas, work and travel and meet people and everything we collected became something creative. D: When I had a show in Moscow or in Canada, I could do Housewife there. When you were in Hong Kong, you could do it there. A: I was hired by a couple to have sex in Hong Kong. It’s true, but I was standing there, and suddenly I freaked out. So eventually, I had this wonderful experience with lesbians there. Because they didn’t take me to this island to have sex with them, I was staying in Hong Kong all by myself, and I met a girl in the street. It’s very dangerous to do cruising in Hong Kong, and the girl happened to be a lesbian, and she took me to a club on the top of a building where there were all those Chinese butches in suits with girly girly girly lesbians. It gave me the opportunity to do a reportage in Housewife. Every situation was an opportunity to fill the pages.
A: Our lovers, our friends, we made fun of. People started to approach us, not only to be part of it but also to work with us. So we discovered the talent of Tiphaine Kazi-Tani, who is a super good writer. They never wrote before, and they wrote in Housewife. D: Yeah, because some of the people at the Pulp were like 16 and 17. A: We discovered Sylvie Bardet, Sophie Anquez and who else? D: Virginie Despentes. A: We did not discover Virginie Despentes! D: No, we asked Virginie, and we made fun of Ann Scott’s tattoos. There was a cast for Housewife and there were so many talented people around us. A: What did Virginie Despentes write?
A: That’s the famous odorama page. I have pictures of you on the floor with your little brush doing all the covers. We were doing everything by ourselves, so when Dana had a brilliant idea like this, we did it. We put some perfumed paste on the pussy picture so that when you scratch it, you can smell something. Did you pick up the smells? D: I did; I ordered them from the States. There was gasoline, garlic, cedar, or leather. A: Yeah, leather was cool, but we had to do the 2000 copies by ourselves. Another time, we inserted a sheet of toilet paper in each copy. We also made two thousand fake cocaine pouches.
D: The lawsuit A: Exactly tell me about the lawsuit? D: I’m not telling anything because I’m sure I signed some papers. But I got charged with “incitement to paedophilia” by a girl, and the police came and got me in Canada over a fanzine. They thought I was a paedophile because I’d made an ad saying, “Have a lesbian daughter guaranteed.” And the girl in the image sued me, and one of my defences in the French criminal court was, “Who would want to have a lesbian daughter?” So obviously, it was satire. A: Jesus! D: When my lawyer was trying to defend me, saying that was part of my artistic project, to show how much I thought about life, they started holding up pills, but one of them had a swastika on the back, so my lawyer was holding it up. [Laughing] It was just a disaster. But we won the court case.
D: Well, I mean, it traumatised the girl; it was an awful situation, and so I wouldn’t want to say anything more about it. But we had to tear the back page off the Housewife two thousand times. A: How did she come across the fake ad? Did she come to the Pulp? D: By coincidence of coincidences. I bought the image in Canada, but she was from France, so it was just crazy for our paths to meet. But that was almost the end of the magazine too, because when you start getting litigation for a fanzine, it’s dangerous.
D: That was the same problem; you still get the lawsuits on the pills too. You get the letters; it’s all part of it. Is there anything else you’d like to know? A: This issue is from 1999. D: I think there were a couple of issues in 2000, and that’s the end.
D: I will let Axelle answer that. A: The Pulp was probably one of the last night experiences that was free in the pre-internet era. Everything was kind of Do It Yourself, and it didn’t have the agenda of becoming the best place in Paris or whatever. It happened; there was no plan. It was a night where you could try anything; we didn’t care about profitability. There wasn’t this pressure of making money or being hype. Even if we were trendy, because we were overflowing with culture and creativity. It is under scrutiny today because the night must be profitable and look good on Instagram. You have to always be in the good place. The Pulp was sometimes awful; you would end up there at 3 a.m. with bad alcohol and drunk people stuck in an awful time-space with three ugly girls kissing and dancing to terrible music. But then a naked dude would show up with a chainsaw and make a performance in the middle of the night. But you might also come across Nan Goldin and her gang, like in the underground nightclubs of New York, San Francisco, London, or whatever. Even with the success, this underground feeling stayed until the end. Housewife marked this era because people associate it with the Pulp and its freedom, like when we would make an almost unreadable page. It lasted 3 or 4 years of total freedom and creativity.
A: In hindsight, the Pulp and Housewife changed the way lesbians were perceived by people, especially gay people who really owned the night. All of a sudden, we became edgy. Gay people were our main fan base; at the time, we were the new thing in town. Before the Pulp, in the early nineties, lesbians were considered chiante, boring, frustrated, and always grumpy girls. When we got the keys to that nightclub, we had no idea what to do with it, and that’s the beauty of it. It became our playground. Delphine, who later became DJ Sextoy, just bought turntables and installed them in her mother’s garage. On my side, I was very inspired by the Anglo-Saxon BDSM scene because I thought that guys in leather and Nazi hats were cool. It was a stepping stone for many of us, as Michelle was able to create a climate of total freedom for us. Not only for us, but for a whole generation. When Kill the DJ started organising parties at the Pulp at the turn of the millennium, it became a laboratory for French electronic music. Collectives from all around started coming and trying stuff, meeting there. The French touch was already more installed in places like Le Queen, but ours was the laboratory that gave its credentials to queer culture in France. Before the Pulp, dykes like us would go out in the nightclubs of the posh 8th arrondissement, Le Memories, and Le Garage. These fancy and expensive places, where you would have to dress accordingly and drink a Champagne glass for 100 francs, were the lesbian night at that moment. These places like Le Katmandou in Pigalle were owned by an old-school lesbian clique, and there weren’t any trashy places like La Mutinerie today with girls wearing mohawks, coloured hairs, and piercings. When Dana arrived in Paris in 1995, she knew all these places, and she would be shocked. D: Also, the names of these places were completely depressing. A: Ten years of Le Pulp changed all that, while everything was completely improvised, and we had to deal with the success too. At some point, the line outside would be 200 metres, and people would wait 3 hours to get in. And Christine and Mimi would tell the boys to calm down and make way for the girls to get in. Mimi might be the only person in the world to refuse Madonna, who wanted her to privatise the club for her aftershow at 2 a.m. on a Saturday night. To do that, you need to be either crazy, totally high, or free, and I think she was completely free. Le Pulp was a space that never lost its autonomy.