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Berlin,

le 9 décembre 2016

Christian Gfeller et Anna Hellsgård ne sont pas seulement responsables du duo d’artistes qui porte leurs noms de famille. Avant de rencontrer Anna, Christian avait déjà créé Bongoût (1995-2012), le zine punk de bon goût. Ils travaillent ensemble depuis 2001 et ont également créé Re: Surgo, un projet sérigraphique qui publie principalement leurs propres expérimentations, mais aussi le travail d’autres artistes.
Si vous ne connaissez rien à la sérigraphie, leur travail est simplement magnifique. Mais si vous connaissez cette technique d’impression, alors vous réalisez à quel point leur approche expérimentale est bluffante. La sérigraphie est binaire, soit l’encre passe à travers les mailles, soit elle est bloquée. Tout type de dégradé est donc impossible, et les gens utilisent généralement des trames de demi-teinte pour les simuler. Les livres et les gravures de Gfeller et Hellsgård sont pleins de dégradés, partout. Ils sont imprimés en sérigraphie, mais ils sont en réalité l’œuvre de deux peintres qui ont détourné une technique de son usage habituel pour réaliser leur œuvre. Habituellement, on utilise un film pour préparer l’écran,… eux ne le font pas. Comme leurs images sont réalisées en recouvrant une surface de couleur par une autre, ils utilisent juste du ruban adhésif pour préparer leur écran, et imprimer des formes très simples dans des couleurs vives.
Aujourd’hui, le duo publie principalement des livres et des gravures abstraites, mais leur expérience en matière de zines et de sérigraphie trouve son origine dans la scène des graphzines et son esthétique trash et provocante. Vous pouvez toujours trouver cette inspiration dans les artistes qu’ils publient et qui sont généralement des grands noms de l’histoire du graphzine, comme Stu Mead, Blanquet (de United Dead Artists), Manuel Ocampo, Kerozen…
Les zines les plus drôles qu’ils publient sont une série de livres de coloriage consacrés à des artistes célèbres : Beuys, Koons, Picasso, et même Rothko ! Dans leurs œuvres abstraites, ils donnent également un coup de pouce avec des titres provocateurs et loufoques qui se moquent de la théorie de l’art contemporain, comme : De la Condition Postmoderne, Sur la décontextualisation d’un paradigme esthétique, METAKUNST du simulacre postmoderne, ou Pour un abstractionisme informe, expérimental, fondamentalement anti-autoritaire et Gabba Gabba Hey !
Créer des zines et des estampes abstraites ne signifie pas automatiquement que votre travail doit être ennuyeux et apolitique. En un sens, ce qu’ils font est le contraire de la tendance du formalisme zombie qui a frappé le monde de l’art américain dans les années 2010. En se concentrant uniquement sur une forme abstraite dénuée de sens, les formalistes zombies laissent le pouvoir de l’argent et du marché de l’art les gouverner. Ce n’est que lorsque Trump était sur le point d’être élu qu’ils s’indignaient de voir leurs peintures sur les murs et l’Instagram de sa fille Ivanka. Avant que cette idéologie fasciste ne dirige leur pays, ils profitaient simplement de l’argent et de la publicité d’Ivanka et étaient très heureux de vendre leurs peintures décoratives pour son penthouse. L’abstraction peut être politique, elle est politique, comme toute autre forme d’art, et vendre directement des tirages artisanaux bon marché, comme le font Gfeller et Hellsgård, est une prise de position politique.
Bonjour, pouvez-vous commencer par vous présenter ?

AH : Bonjour, je m’appelle Anna Hellsgård. CF : Je suis Christian Gfeller, je suis français. AH : Je suis de Suède. CF : Nous travaillons en duo depuis 2001. AH : Oui, par là, peut-être 2003. CF : On est ensemble, on est artistes en premier lieu, mais on est aussi éditeurs et on gère un espace, qui est une extension de notre travail. Le centre de notre pratique est la sérigraphie. On réalise des œuvres uniques sous forme de peinture. On imprime sur des panneaux de bois, sur des toiles, etc… du petit format à la très grande œuvre in situ. On fait beaucoup de livres uniques en grand format, comme des livres monotypes. Et on produit des éditions.

Est-ce que vous pouvez expliquer un peu, pour les gens qui ne connaissent pas la sérigraphie, comment on fait une sérigraphie unique, parce que c’est un procédé d’impression qui est destiné à faire plusieurs exemplaires. Alors comment la transformer pour en faire des motifs uniques ?

CF : Depuis des années, on a produit des éditions et notre intérêt s’est lentement déplacé vers les accidents du processus d’impression et, depuis trois ou quatre ans, toute notre pratique est basée sur… AH : …des erreurs d’impression, des expériences… CF : …et la déconstruction du processus de sérigraphie. Maintenant, on en est là, on utilise l’écran comme un peintre utiliserait un pinceau.

Donc il n’y a pas nécessairement de film positif, parfois vous prenez juste l’écran et mettez de l’encre et un morceau de ruban adhésif ?

CF : Non, on expérimente complètement. AH : On utilise aussi des films, mais plus beaucoup. CF : Pas toujours, si on en a besoin, on utilise du film. Mais on travaille aussi avec du papier, du ruban adhésif, des pochoirs… AH : …parce qu’utiliser un film prend toujours tellement de temps. Il faut l’imprimer, insoler l’écran, c’est tellement de préparation. Lorsqu’on a une idée, c’est plus rapide de couper du ruban adhésif et de masquer certaines choses sur l’écran. C’est un mode d’impression plus vivant. Sinon, la sérigraphie est très structurée et il faut suivre chaque étape.

Et donc, cette expérimentation est le résultat d’un très long processus d’édition et de publication avec la sérigraphie. Je crois que toi, Christian, tu as commencé avec Bon Goût Press ?

CF : Oui, j’ai commencé en 1995. Au fil des ans, je pense qu’on a publié environ trois ou quatre cents livres, zines, livres d’artistes en sérigraphie, etc.

Tu étais déjà à Berlin ?

CF : J’étais à Strasbourg en France. Puis on a déménagé ensemble à Bordeaux et ensuite ici à Berlin. On a donc fait beaucoup de collaborations, on a publié, on a produit. Au fil des années, on a en quelque sorte maîtrisé la technique de la sérigraphie, la bonne manière, et ce n’était plus un défi. On pouvait imprimer en six ou sept couleurs avec des calages. AH : Parfaitement et tout. CF : On a dû trouver autre chose. Lentement, on a commencé à expérimenter et à trouver une nouvelle façon de repenser l’ensemble du processus.

Quel genre de choses on trouvait dans les zines et les livres d’artistes de Bon Goût ?

CF : C’était quelque part entre l’illustration, le dessin, les arts contemporains et il y avait une influence punk et subversive. AH : C’était aussi beaucoup de musique, de la musique noise. CF : très lié à la noise expérimentale, au punk… AH : …des gens en colère… (les deux rient) CF : Colère, beaucoup de colère

Oui, la sérigraphie est un bon moyen d’exprimer la colère, on peut avoir des tonnes de couleurs et des résultats très bruts.

CF : Et c’est comme du sport, c’est très physique.

Puis vous avez déménagé à Berlin et c’est là que vous avez fondé Re: Surgo ?

CF : On a simplement changé de nom parce qu’on vouait clore un chapitre après avoir utilisé le même nom pendant 17 ans. On était un peu fatigués de porter cet héritage, les gens attendaient quelque chose. En fait, on faisait la même chose, il y a une continuité. Il est possible que nous changions à nouveau de nom.

C’est pour ça que ça s’appelle Re: Surgo, parce que c’est quelque chose de nouveau qui se lève ?

CF : Oui, exactement. AH : mais c’est la même chose. CF : la continuité, comme une spirale.

Alors pourquoi la boutique s’appelle-t-elle In: Surgo ?

AH : Bonne question. CF : Je ne sais pas. AH : En fait, on n’utilise pas vraiment ce nom. CF : C’est pour embrouiller les gens. On essaie toujours de rendre les choses compliquées. AH : La maison d’édition s’appelle Re: Surgo, quand nous publions des choses d’autres personnes, et ensuite la boutique s’appelle In: Surgo et nous travaillons sous nos propres noms. Mais ce n’est pas si important. CF : J’avais eu l’idée de changer chaque semaine pour un nouveau nom. Tu sais, ça ouvre quelques portes si tu penses comme ça. Ça te fait sortir de ta routine.

C’est comme ça que l’espace a évolué au fil des ans et que vous avez expérimenté différents formats ?

CF : Maintenant, c’est plus ou moins une boutique de livres d’artistes et de zines, avec des estampes, etc. Mais on a utilisé l’espace comme une salle d’exposition, un atelier, on a organisé des concerts dans la salle, des soirées de cinéma expérimental. Bien sûr, il y a des problèmes économiques, on doit payer le loyer, donc une partie de tout ça doit être économiquement viable, mais une fois que c’est fait, pour le reste, on est libres.

Ça peut donc changer de fonction lorsque vous avez un autre projet ?

CF : Définitivement, quand on a l’impression d’avoir dit ce qu’on devait dire ou montré ce qu’on devait montrer. AH : On change maintenant, parfois il y en a moins, parfois c’est plus. Ça dépend de ce qu’on a à dire, parfois on a besoin d’en avoir moins autour de nous.

Je voulais vous interroger sur la sélection de publications que vous proposez. Je suppose que ce sont des amis et des personnes qui travaillent peut-être dans la même direction que vous ?

CF : On essaie de le voir comme un objet curaté. Le centre, c’est notre pratique, notre travail, puis nous invitons nos amis, nos pairs, des personnes avec lesquelles on a des affinités ou des choses auxquelles on veut donner une certaine visibilité. Bien sûr, on va pas se lancer dans le livre d’art grand public ou ce genre de choses, ce n’est pas très intéressant et c’est déjà suffisamment bien représenté. On essaie de ne pas se fermer, de rester ouverts. On n’a pas de sections dans la boutique, tout est mélangé, il faut prendre le temps de découvrir par soi-même. Alors tu passes de l’art contemporain à l’illustration, du roman graphique aux zines, à une lecture plus conceptuelle ou à de l’interview dans un magazine. Mais je pense que l’idée globale a du sens ensemble.

Vous reconnaissez-vous dans le terme graphzine ? Je sais que Bon Goût était probablement plus proche de cette esthétique ?

AH : Je pense qu’une partie de notre production peut être considérée comme des graphzines. Ça dépend, on fait beaucoup de projets différents, certains sont peut-être plus des graphzines. CF : On fait probablement quelque chose entre les zines, les graphzines et les livres d’artistes. Bien sûr, si un livre va dans une institution et qu’il coûte une certaine somme d’argent, il est difficile d’appeler ça un graphzine ou un zine. C’est probablement un livre d’artiste. Je ne sais pas si c’est le prix qui décide de ce qu’est l’objet. Si quelque chose coûte cinq euros, c’est un peu prétentieux d’appeler ça un livre d’artiste. On navigue entre les deux.

Vous pouvez nous parler des artistes que vous publiez ?

AH : En ce moment, on ne publie pas beaucoup d’autres artistes, mais on fait ces mini-zines. On en a fait 66 jusqu’à présent. Ils sont réalisés par des étudiants en art… CF : …des artistes établis, des amis AH : C’est un mélange.

Donc, c’est la publication où vous publiez d’autres personnes ?

CF : Il s’agit de petits livrets de seize pages, chacun étant imprimé dans une couleur différente. Ainsi, lorsque vous regardez leur verso, cela ressemble à une couleur Pantone. On demande aux gens s’ils veulent participer, ils envoient des images en noir et blanc et on s’occupe de l’impression et de la mise en couleur, parfois avec l’aide de nos stagiaires. AH : et c’est aussi principalement de l’illustration, du texte, de la poésie, toutes sortes de styles. Ils sont tous au même format, on utilise le même papier pour l’impression. On essaie de choisir les couleurs de manière à ce qu’elles s’accordent harmonieusement entre elles. CF : Notre ambition est d’en publier quelques centaines, ça donnerait un bon aperçu de l’époque.

Et il y a 125 exemplaires de chaque ?

CF : Oui, et nous ne réimprimons pas. AH : C’est un faible tirage. C’est plus amusant de faire comme ça, de publier des choses qu’on aime, et ça ne prend pas autant de temps. Quand on fait de plus gros livres d’artistes, ça prend beaucoup de temps à produire. Avec 5 couleurs et 60 pages à l’intérieur, ça prend beaucoup plus de temps. CF : Ça nous permet de garder le lien avec nos origines. C’est exactement comme ça que j’ai commencé il y a 20 ans. 21 ans après, on fait toujours des petits zines pour 5 euros. AH : C’est important pour nous de garder des choses réelles comme ça, de garder l’équilibre.

Pourquoi avez-vous déménagé à Berlin ? Qu’est-ce qui vous a poussé à venir dans cette ville ?

CF : Pas à cause du temps ! [Rires] J’ai grandi ici et on s’est rencontrés ici. AH : J’ai juste déménagé ici pour faire une pause de la Suède, je n’étais pas censé rester. CF : On n’a jamais vraiment pensé à nous installer ici, c’est arrivé comme ça.

Parce que tu travaillais et faisais des trucs et que tu n’es jamais parti ?

AH : On est partis à Bordeaux pour un an et demi. C’est une belle ville, mais c’est très petit et loin de tout. CF : C’est une bonne base pour revenir, on voyage beaucoup et il y a beaucoup d’espace ici. C’est un grand village où l’on peut se concentrer. On restera ici. AH : En hiver, on pense toujours à partir ailleurs où il fait chaud et ensoleillé.

C’est ça que vous cherchiez à Bordeaux ? Le soleil ?

CF : C’était plus ou moins l’idée, mais il y avait trop de soleil pour nous. AH : Trop chaud.

Vous êtes resté ici à cause de la communauté artistique et de tout ce qui se passe ?

CF : Bien sûr. On aime aller aux vernissages, aux musées, aux concerts. AH : Ce qui nous a le plus attiré, c’est les concerts. Il y a beaucoup de groupes qui passent à Berlin, la scène musicale est géniale. CF : C’est ce qui nous a attirés au début, il y a quinze ans. Aujourd’hui, je ne quitterais pas Berlin à cause de la scène artistique, car on aime voir des expositions et il y a tellement de choses qui se passent, des expositions dans des galeries, des musées, des project space, et ça alimente notre travail. Ça donne l’énergie nécessaire pour continuer.

Est-ce que ça a beaucoup changé ? On dirait que les prix de l’immobilier ont augmenté et qu’il est plus difficile pour les artistes de trouver des espaces bon marché.

CF : Tout est devenu plus professionnel, ce qui est à la fois une bonne et une mauvaise chose. C’est moins amusant, mais ça génère des opportunités de carrière. AH : Avant, c’était comme si n’importe qui pouvait ouvrir un café ou autre. Chacun pouvait faire ce qu’il voulait, mais ce n’était pas forcément bon. [Rire] Maintenant, c’est plus sélectif. On perd cette énergie d’une certaine manière. La nourriture est bien meilleure maintenant. CF : Et l’art est bien meilleur aussi. Mais c’est moins amusant. C’est comme ça. AH : C’est plus professionnel. À l’époque, on allait à un concert et il ne commençait jamais, les gens n’entendaient rien, ils étaient juste en train de discuter et de boire. C’était plus décontracté.

Ce quartier [Mitte] a beaucoup changé. Vous m’avez dit que c’était le quartier des galeries ?

CF : C’était le hot spot. En 2009, après la crise, beaucoup de galeries américaines qui avaient des antennes ou une extension ici ont fermé, beaucoup de galeries européennes aussi. AH : Je me demande si c’était la crise. CF : Les loyers sont devenus de plus en plus élevés, alors tout le monde a déménagé dans de nouveaux endroits comme Potsdamer Platz. Mais il y a pas mal de bonnes institutions ici. AH : Des galeries avaient ouvert un deuxième espace ici, parce que c’est cool ici et elles sont parties quand elles ont découvert que personne n’achetait d’art, il n’y a pas de marché ici. Même si le loyer est bon marché, vous devez toujours payer deux ou trois personnes qui travaillent, peut-être que ça va pendant 5 ans, mais ensuite… CF : …et il n’y a toujours pas de marché ici. La dernière foire d’art, je ne sais pas si elle va être reconduite, c’est une longue histoire d’échecs.

C’est un bon endroit pour faire de l’art, mais personne ne l’achète ?

CF : C’est un bon endroit pour produire. AH : Il y a trop d’artistes.

J’ai une dernière question. Je regardais les deux impressions qui sont derrière vous et elles sont très précises et pourtant complètement aléatoires. Pour en avoir deux ou trois superbes comme celles-là, y en a-t-il beaucoup qui partent à la poubelle ? Parce qu’en expérimentant, il faut un certain temps pour obtenir ce que l’on cherche ?

CF : Ceux qui sont derrière nous sont des éditions. C’est une partie d’un travail qui ressemble plus à du graphisme, moins libre et plus planifié. On expérimente beaucoup, mais avec la sérigraphie, tu peux toujours ajouter une couche ou tout recouvrir en blanc, garder certaines parties et construire sur cette base. On ne détruit jamais vraiment rien, c’est l’idée de Re: Surgo, le recyclage. AH : Pour ceux-là, s’ils sont mal imprimés, on les retire de l’édition, mais ensuite, ils sont tous différents, ils ont tous des petits défauts.

Bien sûr, les imperfections vous intéressent.

AH : Oui, on se l’autorise. CF : On n’essaie pas de faire des impressions d’ordinateur.

Merci beaucoup !

Berlin,

December 9th, 2016

Christian Gfeller and Anna Hellsgård are not only responsible for the artist duo that bears their last names. Before he met Anna, Christian had already created Bongoût (1995–2012), a “good taste” punk zine press. They have been working together since 2001, and they created Re: Surgo, a silkscreen press that mostly publishes their own experimentations, but also the work of other artists.
If you don’t know the first thing about silkscreen, their work is just gorgeous. But if you ever learned this printing technique, then you realise how experimental their approach is. Screen-printing is binary; the ink either goes through the mesh, or it is blocked. Any type of gradient is therefore impossible, and people usually use half-tone patterns to fake them. The books and prints of Gfeller and Hellsgård are full of gradients everywhere. They are printed in silkscreen, but they really are the work of two painters who divert a technique out of its usual use in order to make their work. Usually, you need to use a film to prepare the screen,… they don’t do that either. As their images are made by covering a field of colour with another, they will just use tape to prepare their screen and print very simple shapes in bright colours.
Today, the duo mostly publishes abstract books and prints, but their background in zines and silkscreen stems from the graphzine scene and its trashy, provocative aesthetic. You can still find this inspiration in the artists that they publish who are usually big shots of graphzine history, like Stu Mead, Blanquet (from United Dead Artists), Manuel Ocampo, Kerozen…
The most hilarious zines that they publish are a series of colouring books dedicated to famous artists: Beuys, Koons, Picasso, and even Rothko! In their abstract works, they also give an edge with wacky provocative titles that mock contemporary art theory, like: De la Condition Postmoderne, Sur la décontextualisation d’un paradigme esthétique, METAKUNST du simulacre postmoderne, or Pour un abstractionisme informe, expérimental, fondamentalement anti-autoritaire et Gabba Gabba Hey!
Creating abstract zines and prints does not automatically mean that your work has to be boring and apolitical. In a sense, what they are doing is the opposite of the Zombie Formalism trend that has been hitting the American art world in the 2010s. By concentrating only on an abstract form carrying no meaning, the formalist zombies let the power of money and the art market rule them. It was only when Trump was about to be elected that they were outraged to see their paintings on his daughter’s walls and on Instagram. Before this fascist ideology ruled their country, they just enjoyed Ivanka’s money and publicity and were very happy to sell her decorative paintings for her penthouse. Abstraction can be political, it is political, like every other form of art, and selling cheap handmade prints directly, like Gfeller and Hellsgård do, is a political stance.
Hello, can you start by introducing yourselves?

AH: Hello, I’m Anna Hellsgård. CF: I’m Christian Gfeller; I’m French. AH: I’m from Sweden. CF: We’ve been working as a duo since 2001. AH: Around that time, maybe 2003. CF: We are together; we are artists in the first place, but we are also publishers, and we run a space, which is basically an extension of our work. The centre of our praxis is screen-printing. We do unique works in the form of painting. We print on wood panels, on canvas, and so on… from small to very large in situ works. We do a lot of unique books in larger sizes, like monotype books. And we do editions.

Can you explain a bit, for people who don’t know silkscreen, how you make a unique silkscreen, because it’s a printing process that is meant to make several copies. So how do you transform it to make unique patterns?

CF: Over the years, we were doing editions, and slowly our interest shifted to the accidents of the printing process. For the last three, four years, all our practice has been based on… AH: …misprinting, experimenting… CF: …and deconstructing the silkscreen process. Now, where we’re at, basically, we just use the screen the way a painter would use a brush.

So there isn’t necessarily film positive; sometimes you just take the screen and put some ink and a piece of tape on it?

CF: No, we’re completely experimenting. AH: We use film too, but not so much anymore. CF: Not always; if we need it, we use some film. But we also work with paper, tape, stencils… AH: …because using a film always takes such a long time. You have to print it out; you have to light the screen; that’s so much preparation. When you have an idea, it is faster to just cut through some tape and mask some things on the screen. It’s more a live kind of printing. Otherwise, screen printing is very structured, and you have to follow every step.

And so this experimentation is the result of a very long process of editing and publishing with silkscreen. I think you [Christian Gfeller] started with Bon Goût Press?

CF: Yeah, I started in 1995. Over the years, I think we published probably about three to four hundred books, zines, and artists’ books in screenprint.

Was it in Berlin already?

CF: It was in Strasbourg in France. Then we moved together to Bordeaux, and then here in Berlin. So we did a lot of collabs, we published, and we produced. Over the years, we kind of mastered the screen-print technique the proper way, and it was not challenging anymore. We could print like six or seven colours with registrations. AH: Perfectly and everything. CF: We had to find something else. Slowly, we started to experiment and find a new way to rethink the whole process.

What kind of material was in Bon Goût zines and artists’ books?

CF: It was somewhere in between illustration, drawing, and contemporary arts, and it was very very much punk-influenced and subversive. AH: It was a lot about music also, noise music. CF: very much linked to experimental noise, punk… AH: …angry people… (both laugh) CF: Anger, a lot of anger

Yeah, silkscreen is a good medium to express anger; you can have tons of colours and very raw results.

CF: And it’s like working out; it’s very physical.

Then you moved to Berlin, and that’s when you founded Re: Surgo?

CF: We just changed the name because we wanted to close a chapter after 17 years of using the same name. We were a little bit tired of carrying that heritage; people were expecting something. Basically, we’re just doing the same; there’s a continuity. We might change the name again.

Is it why it is called Re: Surgo, because it is something new that is rising?

CF: Yeah, exactly. AH: But it’s the same. CF: the continuity, like a spiral.

So why is the shop called In: Surgo?

AH: Good question. CF: I don’t know. AH: We actually don’t really use that name. CF: It’s to confuse people. We always try to make things complicated. AH: The press is called Re: Surgo when we’re publishing stuff by other people, and then the shop is called In: Surgo when we’re working under our own names. But it’s not so important. CF: I had the idea of changing every week to a new name. You know it opens some doors if you think so. It gets you out of your routine.

That’s how this space has changed over the years, and have you experienced different formats?

CF: Now it’s more or less like an artist books and zines shop with prints and so on. But we used the space as an exhibition room and studio; we have had concerts in the room and experimental cinema evenings. Of course there are some economic issues; we have to pay the rent, so one part of this has to be economically viable, but once this is done, for the rest we’re free.

So it may change function when you have another project?

CF: Definitely, when we feel like we said what we had to say or showed what we had to show. AH: We’re changing now; sometimes it’s less, sometimes it’s more. It depends on what we have to say; sometimes we need to have less around us.

I wanted to ask you about the selection of publications that you offer. I guess those are friends and people who work maybe in the same direction as you?

CF: We try to see it as a curated object. The centre of it is our praxis, our work, and then we invite our friends, peers, people we feel affinity with, or things we want to give some visibility to. Of course, we won’t go in with the mainstream art book or this kind of thing; it’s not very interesting, and they are already represented well enough. We try not to close ourselves, to keep it open. We don’t have any sections in the shop; it’s all mixed; you have to take the time to discover by yourself. Then you go from contemporary art to illustration, from graphic novels to zines, to more conceptual reading or interviews in a magazine. But I think the whole idea makes sense together.

Do you recognise yourself in the term graphzine? I know that probably Bon Goût was closer to that aesthetic?

AH: I guess some parts of our production can be considered graphzines. It depends; we do a lot of different projects, some are maybe more graphzines. CF: We’re probably doing something in between zines, graphzines, and artists’ books. Of course, if a book goes into an institution and costs a certain amount of money, it’s hard to call it a graphzine or a zine. It’s an artist book, probably. I don’t know if it’s the price that decides what the object is. If something costs five euros, it’s a bit pretentious to call it an artist book. We navigate in between.

Can you tell us about the artists that you publish?

AH: Now we don’t publish so many other artists, but we do these mini-zines. We’ve done 66 so far. They are made by art students… CF: …established artists, friends AH: It’s a mix.

So that’s the publication where you publish other people?

CF: They are little sixteen-page booklets; each one is printed in a different colour. So when you look at their backs, it looks like Pantone colouring. We ask people if they want to participate; they submit black-and-white images, and we do the printing and colouring, sometimes with the help of our interns. AH: and it’s also basic illustration, text, poetry, all kinds of styles. They are all in the same format; we are printing using the same paper. We try to pick the colours so that they fit together. CF: Our ambition is to publish a few hundred; it would give a good view of the period.

And there are 125 copies of each?

CF: Yes, and we don’t reprint. AH: It’s a low run. It’s more fun to do it that way, to publish things that you like, and it doesn’t take so much time. When we do bigger artist books, it takes a very long time to produce; with 5 colours and 60 pages inside, it takes much longer. CF: It keeps us linked to where we’re coming from. It’s exactly how I started 20 years ago. 21 years later, we’re still doing small zines for 5 euros. AH: It’s important for us to keep it real like this, to keep the balance.

Why did you move to Berlin? What drove you to this city?

CF: Not because of the weather! [laughs] I grew up here, and we met here. AH: I just moved here to have a break from Sweden; I wasn’t supposed to stay. CF: We never really thought about moving here; it just happened.

Because you were working and doing stuff and never left?

AH: We left for Bordeaux for one and a half years. It’s a nice city, but it’s very small and away from everything. CF: Berlin is a good base to come back; we travel a lot, and there’s a lot of space here. It’s a big village where you can concentrate. We’re staying here. AH: In the winter, we’re always thinking of moving elsewhere where it’s warm and sunny.

So that’s what you were looking for in Bordeaux? The sun?

CF: It was more or less the idea, but there was too much sun for us. AH: Too warm.

Did you stay here because of the artist community and everything that is happening?

CF: Of course. We love to go to openings, museums, and concerts. AH: That’s what attracted us more—the concerts. There are many bands stopping by Berlin; the music scene is great. CF: That’s what attracted us from the beginning, fifteen years ago. Now I wouldn’t leave Berlin because of the art scene because we love to see exhibitions, and there’s so much going on: gallery exhibitions, museums, project rooms, and that is also feeding our work. It gives you the energy to continue.

Has it changed a lot? It seems like real estate prices went up and that it’s harder for artists to find cheap places.

CF: Everything got more professional, which is a good thing and a bad thing. It’s less fun, but it generates career opportunities. AH: Before, it was like anyone could open a café or whatever. Everyone could do whatever they wanted, but it wasn’t necessarily good. [laughs] Now it is more selective. We’re losing this energy in a way. We’re eating way better food now. CF: And seeing better art, also. But it is less fun. It is what it is. AH: It is more professional. Back in the days, we would go to a concert and it would not even start; people couldn’t hear anything; they were just mingling and drinking. It was more laid-back.

This neighbourhood [Mitte] has changed a lot. You told me that it used to be the gallery neighbourhood?

CF: It used to be the hot spot. In 2009, after the crisis, a lot of American galleries that had dependencies or extensions here closed, and a lot of European galleries closed too. AH: I’m wondering if it was the crisis. CF: The rents got higher and higher, so everybody moved to new locations like Potsdamer Platz. But there are quite a few good institutions here. AH: Galleries had opened a second space here because it was cool, and they left when they discovered that nobody was buying art and there was no market here. Even if the rent is cheap, you still have to pay two or three people working; maybe it’s ok for 5 years, but then… CF: …and there is still no market here. The last art fair, I don’t know if it is going to be reconducted; it is a long story of failing.

It is a good place to make art, but nobody’s buying it?

CF: It’s a good place to produce. AH: There are too many artists.

I have one last question. I was looking at the two prints that are behind you, and they’re very precise and yet completely random. So in order to have a couple of terrific ones like those ones, are there a lot of them that go to the trash? Because while experimenting, it takes a while to get what you are looking for?

CF: Those ones behind us are editions. It’s a part of a work that is more like graphic design, less loose, and more planned. Now we experiment a lot, but then with silkscreen, you can always add a layer or print everything white and just keep some parts and build on that. We never really destroy anything; it’s the idea of Re: Surgo, recycling. AH: For those, if they are badly printed, we would take them off the edition, but then they are all different, they all have little defaults.

Of course, you are interested in imperfections.

AH: Yes, we allow ourselves CF: We’re not trying to do computer prints.

Thank you so much!
Vide point Rose trou
'Blanquet & Gfeller+Hellsgaard, *Vide point Rose trou*, Berlin, Re:Surgo!, 2014, 28 x 19 cm, sérigraphie, 20 pp., 125 exemplaires signés.' 'Blanquet & Gfeller+Hellsgaard, *Vide point Rose trou*, Berlin, Re:Surgo!, 2014, 28 x 19 cm, silkscreen, 20 pp., 125 signed copies.'
Over-view
'Gfeller+Hellsgaard, *Over-view*, Berlin, Re:Surgo!, 2013, 23 x 32 cm, sérigraphie, 28 pp., 50 exemplaires signés.' 'Gfeller+Hellsgaard, *Over-view*, Berlin, Re:Surgo!, 2013, 23 x 32 cm, silkscreen, 28 pp., 50 signed copies.'
In: Surgo bookshop, Berlin, 2017.
'Librairie In: Surgo, Berlin, 2017.' 'In: Surgo bookshop, Berlin, 2017.'