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Paris,

le 11 novembre 2011

Un soir à Paris, en 2011, Laura Morsch-Kihn me propose d’aller boire un verre avec Cary Loren au bar de l’hôtel Regina. L’atmosphère est étrange. Nous sommes seuls dans cet incroyable décor 1900, les serveurs semblent sortis d’un film d’Hitchcock et nous regardons une petite souris circuler entre les fauteuils. Durant cette soirée à l’atmosphère si décadente, Cary nous parle d’un de ses livres préférés écrit par Joris-Karl Huysmans : À rebours. Cinq années plus tard, elle me dira comprendre son attrait pour cet anti-héros excentrique, Jean des Esseintes, symbole de l’esprit décadent du XIXe siècle. Si vous regardez les œuvres de Cary, vous y trouverez une tendance à côtoyer les cimes de l’artifice avec un goût excessif pour toutes sortes de choses étranges et bizarres souvent resurgit du passé.
Cette pratique à rebours a nourri l’esthétique du zine Destroy All Monsters édité par Cary Loren de 1976 à 1979. Pensé comme un moyen de distribuer l’art des membres de l’anti-groupe du même nom composé de Niagara, Jim Shaw et Mike Kelley, il a également façonné leur identité subversive.
Le zine DAM est un album de famille, une mise en scène subliminale, un traitement thérapeutique, un voyage psychédélique, un camp post-apocalyptique… Nous embarquons avec l’ovni Cary Loren à bord de sa machine bricolée à remonter le temps et laissons-nous emporter dans les bas-fonds de la mécanique du mythe Destroy All Monsters. Laura pose toutes les questions, je me fais tout petit, c’est presque comme si je n’étais pas là.
Cary, influencé par les nombreux films de monstres de ton enfance, tu as commencé à réaliser des fan-films dès l’âge de 12 ans. Depuis cette période, et suite à ton apprentissage auprès de l’artiste Jack Smith en 1973, ta pratique cinématographique s’est intensifiée. On peut établir une connexion entre tes films et le fanzine DAM : on retrouve cet attrait pour les couleurs glamours, le montage expérimental, la superposition, les monstres, le cinéma muet, etc. As-tu conçu ce zine de la même manière que tes films ?

C’est une bonne question, puisque les liens entre la photographie, l’art, l’écriture (et la vie) peuvent s’entremêler dans les zines et fonctionnent de la même manière pour les films ou les romans. Le zine fonctionne souvent comme un journal intime ou un journal de bord qui traverse le temps et aborde de multiples sujets, des récits ou des points de vue. J’aime la façon dont les zines peuvent mêler les sphères publique et privée. Ce n’était pas une décision consciente, mais je me souviens que j’étais attiré par les bandes dessinées et les tabloïds underground des années 60 : des anthologies comme Zap, Mad, Cracked et Weirdo, qui étaient des titres phares du mouvement zine.

L’esthétique des journaux underground des années 1960 était fascinante ; The Chicago Seed, The Berkley Barb, Sundance, The Sun, Ann Arbor Argus, The Fifth Estate et San Francisco Oracle : des tabloïds de gauche aux couleurs intenses, avec un design psychédélique et un point de vue anarchiste. Je voulais obtenir une esthétique similaire dans DAM, un retour en arrière dans le temps.

Un zine peut devenir source d’introspection, de poésie, avec son propre code secret et son langage : le zine comme poème autonome.

Il permet de s’éloigner du film ou de l’écriture, de prendre du recul et de considérer le travail d’une manière plus ludique, chaotique ou statique. Il peut correspondre au schéma précis et particulier recherché ou constituer la raison pour laquelle on ne ressent plus le besoin de faire un film.

Le théâtre de Jack Smith a été pour moi une autre influence : ses films, ses écrits, ses diapositives en couleur, son livre Beautiful Book, sa présence et son imaginaire apocalyptique étaient fascinants. DAM était un hommage à l’exotisme (Exotica) de Smith et à ses collages d’obsessions visuelles. Le monde des films muets, les gestes de Marlene Dietrich, Andrea « Whips » Feldman, Jennifer Jones, Dorothy dans le Magicien d’Oz et les films de monstres pouvaient tous coexister dans un livre : un rebondissement d’images extrêmes. Smith a confirmé ce que je recherchais et a été l’élément déclencheur de la création de DAM. Trouver des solutions pour faire des films et des zines nous a amené à prendre des décisions telles que l’achat de films usagés, l’utilisation de scotch pour le montage, ou l’impression sur de vieux dépliants plutôt que sur papier vierge afin de faire des économies – stratégie similaire à celle de l’esthétique trash-kitsch de Smith.

L’éditeur, l’artiste/auteur d’un zine ont le contrôle quasi total sur un zine. Ils sont fournisseurs de contenu, fabricants et distributeurs. Le zine peut être une chanson, un petit enchantement, un objet multidimensionnel, qui repousse les limites et défie la forme. C’est l’art de la propagande : faire sa publicité, convertir, déclamer, jeter un sort et il peut être un lien vers d’autres projets : film, musique ou écriture. Définition du zine : le squelette d’un mythe.

Ton idée que « les zines peuvent mêler les sphères publique et privée » est vraiment intéressante. Si le zine peut être très personnel, c’est aussi une interaction directe et clandestine dans la sphère privée de la vie quotidienne du lecteur. Alors, on peut se demander la réaction du lecteur de l’époque face à ce zine transformant tout en esthétique « trash-kitch » ? Peut-on dire qu’en tant que groupe anti-rock, le zine DAM était un anti-zine, une sorte d’ovni dans le paysage des zines de cette période qui étaient pour leur part majoritairement réalisés en noir et blanc et liés à une seule discipline comme la musique, la politique, le comics, etc. ?

Au moment où l’on a fait ce zine, le public était inexistant. C’était simplement important de dévoiler l’art de DAM au public : de le sortir. Je ne comprends pas comment ce besoin est survenu, ou pourquoi le premier numéro a été imprimé à un millier d’exemplaires. Seuls quelques magasins de disques et librairies étaient disposés à distribuer des zines et il a fallu plusieurs années pour écouler le premier numéro. La plupart ont été donnés gratuitement. Je n’ai jamais entendu parler de gens qui ont acheté le zine DAM. On a jamais eu de retour.

Produire le zine était un moyen de souder le collectif DAM, même s’il s’écroulait. En 1977 et 1978, Kelley et Shaw étudiaient à CalArts à Los Angeles. J’ai été expulsé du groupe, j’ai déménagé à Detroit et je me suis inscrit à l’université de Wayne State. Ce sont des années de transition et le zine en est le reflet. Fin 78, Niagara était le seul membre d’origine à faire partie du groupe et Ron Asheton a continué la musique dans une direction punk rock.

C’était un anti-zine pour un anti-groupe. Notre musique n’a pas bien circulé jusqu’en 1995, mais il était toujours culte pour une minorité. On retrouve un caractère schizophrène chez DAM. C’était à la fois du punk rock et de la noise. Les gens connaissent surtout le zine à travers la réédition chez Primary Information, publiée en 2009, et la musique expérimentale des trois CD sortis sur Ecstatic Peace! en 1994. Le grand public ne pouvait apprécier le genre de musique que nous avions produit. C’était trop abrasif et étrange, résistant à toute forme de popularité.

Le zine permettait de rendre compte de notre travail, de le diffuser et était un moyen d’expérimenter un récit et une thématique. Plusieurs disciplines ont été présentées dans chaque numéro. Par exemple, le numéro 4 contenait un historique complet de DAM, mais il faisait aussi référence aux rituels familiaux, aux photos de famille, de vacances, aux films underground et à la pratique de la photographie.

Les deux derniers zines, les numéros 5 et 6, étaient centrés sur le théâtre et le cinéma et je souhaitais poursuivre dans cette voie. Ils ont été assemblés à Hollywood, en Californie, en 78 et 79, et parodiaient le film noir, l’horreur, l’exploitation et le romantisme à travers des images fixes. Un entrechoc de poésie, des paroles du groupe, une réimpression du Théâtre de la cruauté d’Antonin Artaud et d’illustrations fantastiques, de science-fiction.

Les travaux de Kelley et Shaw figuraient également dans le dernier numéro, avec un focus sur Xanadu, composé des ex-membres de DAM : Ben et Laurence Miller, Rob King et moi-même. Nous étions tous mécontents de la direction punk prise par Asheton, j’ai donc mis en place un petit label et j’ai sorti deux EP sur Black Hole Records : Days of Diamonds (1978, DAM) et Blackout in the City (1979, Xanadu).

DAM Magazine était un mélange de vie quotidienne et d’art, d’œuvres d’art publiques et de figures de la culture Pop. Le mélange de ces sphères était un moyen de façonner notre identité, d’opérer une fusion du public et du privé transformant l’expérience.

Les zines pouvaient s’ouvrir à des champs multiples : hallucinations, popstars, tueurs en série ; mais on pouvait aussi choisir de ne traiter que d’un seul sujet : 8-track Mind, Hirsute Heroines ou Dishwasher.

Il n’y a jamais eu de décision consciente de projeter une idéologie politique dans DAM Magazine. Notre vision était radicale et nous espérions que les œuvres transmettraient ce message. La rhétorique marxiste-maoïste nous emmerdait, mais on a été déçu de voir l’extrême-gauche s’évaporer dans la nuit.

Je ne connaissais pas bien les zines des années 1970 et il y en avait peu à ce moment-là, excepté dans le domaine de la science-fiction ou du fantastique. Les zines de musique et les art zines ont commencé à apparaître plus fréquemment à la fin des années 1970 et étaient orientés vers la culture pop, principalement centrés sur le punk, tout comme sur un quasi retour à l’époque de la révolution ronéotype de la Beat Generation.

L’incroyable qualité du zine DAM et la manière dont il est pensé nous laisse croire qu’il te fallait pas mal de temps pour le concevoir. Est-ce pour cette raison que vous avez seulement sorti six numéros en trois ans (1976-1979) ? Ou était-ce pour être en accord avec votre positionnement dans la musique, car en tant que groupe anti-rock, l’idée était de produire à minima ?

Il a fallu environ un an pour réaliser le premier numéro, imprimé principalement en lithographie offset. J’ai pris des cours dans une école professionnelle et j’ai appris à faire des trames et à me servir des machines à imprimer. Je n’étais pas le meilleur imprimeur et j’étais embarrassé par le rendu peu soigné. Je n’ai jamais obtenu la qualité que je voulais. La plupart des couvertures étaient imprimées dans une imprimerie professionnelle, ce qui permettait qu’elles soient bien nettes.

J’ai réalisé la publicité de notre première cassette de musique : Destroy All Monsters Greatest Hits dans le premier numéro de DAM et dans Lightworks Magazine. Nous avons vendu moins de trente exemplaires de cette K7 vendue 2$. Au fur et à mesure de l’évolution du groupe, son histoire et sa musique ont été couvertes comme des news dans le zine.

Au cours de l’été 78, j’ai assemblé le numéro 5 à Hollywood et j’y suis revenu en 1979 pour mettre en page le numéro 6. Je suis resté à Los Angeles, puis je suis reparti à Detroit pour mes études à l’université de Wayne State. Les deux derniers numéros ont été réalisés dans l’imprimerie étudiante. J’ai fait du bénévolat en échange de l’impression. Des copies spéciales du numéro 5 contenaient un insert couleur Xerox, un processus coûteux à l’époque. C’était lent et compliqué.

Tout a été décidé en fonction de mes finances. Les vinyles étaient (et sont toujours) un processus coûteux. On voulait faire cela, et nous nous sommes dirigés dans cette direction, mais c’était un peu trop pour nous. L’impression du zine nous semblait plus réaliste et il y avait un avantage à apprendre à imprimer et à pouvoir travailler dans les imprimeries.

C’est intéressant de comprendre comment le DAM zine est devenu culte. Est-ce dû au succès de Mike Kelley et Jim Shaw sur la scène de l’art contemporain ? Ou votre fanzine a-t-il permis de faire perdurer un mythe par la mise en scène du groupe en dehors de sa musique ? L’utilisation intense – au sein du zine – des outils de la fiction (cinéma, théâtre, etc.) et le glamour des couleurs acidulées participe à la construction d’un storytelling ou d’une fan-fiction ?

Oui, « mise en scène » est une bonne description, ainsi que fan-fiction. Je voulais inclure toutes nos influences, établir un discours par le biais des images : quelque chose de cru, d’opportuniste et probablement de choquant. Un mélange de tout cela. L’influence cinématographique et théâtrale a également contribué à créer un cadre pour le zine.

Kelley a décrit plus tard DAM comme un travail de sculpture ou de méthode pour son art : « Ce groupe était ma stratégie de peinture en chair et en os », a-t-il déclaré. Peut-être parce que le studio de répétition était adjacent à sa chambre. C’était un espace bordélique comparé à son salon qui était nickel. Au moment de DAM, le travail de Kelley était brutal, ardent, grotesque et lié à la bande dessinée. Il était passionné sans le côté conceptuel. La salle de répétition a pu avoir un caractère intrusif ou invasif dans sa vie privée, mais elle a également créé une recrudescence subversive.

Les peintures de Jim Shaw, ses collages surréalistes et cette manière abstraite d’utiliser la figure étaient proches de l’esthétique de mon travail. « God’s Oasis », l’espace où l’on traînait, était l’une des créations majeures de Shaw. La maison était remplie d’objets de récupération : des objets kitsch que Shaw recherchait et arrangeait soigneusement. Elle abritait également sa vaste collection de disques et de bandes dessinées. « God’s Oasis » était notre lieu de rencontre, et a eu une influence capitale sur chacun d’entre nous.

L’idée de créer de la fiction dans le zine est intéressante, en raison de notre auto-mythologie habituelle. Des fragments de paroles, de films et d’histoires ont été mélangés, reflétant cette atmosphère hyper créative. Le collectif était porté par un esprit socialiste, combinant l’ensemble de notre art qui prenait de nombreuses directions.

Par manque d’argent et de temps, le projet prit fin. En dehors de la musique, le zine a permis à DAM de continuer à exister et a contribué à créer le mythe d’un DAM immortel.

En 2009, j’ai organisé une exposition des archives de DAM avec James Hoff, le responsable de la programmation de Printed Matter Inc. Cette exposition, Hungry for Death, a parcouru l’Europe et quelques villes aux États-Unis jusqu’au début de l’année 2012 – un projet visant à s’affranchir de toute hiérarchie au sein de DAM.

La dernière exposition des archives de DAM a été organisée par Mike Kelley avec Dan Nadel à la galerie PRISM à Los Angeles. La vision de Kelley sur le groupe était très différente. C’était une exposition proprement structurée et bien organisée montrant le travail en tant qu’artistes individuels. Le catalogue de cette exposition, Return of the Repressed, relaye l’histoire de DAM. L’exposition s’est terminée deux semaines avant le suicide de Kelley.

Lorsque le zine DAM est apparu, les membres étaient assez jeunes et on peut vraiment sentir cette curiosité et cette fraîcheur. En même temps, nous voyons une grande maturité à travers les références et la façon de mener le projet. DAM zine était un projet artistique à part entière, utilisé comme support pour un groupe d’artistes, tout comme pour les revues des avant-gardes européennes : Dada, les Surréalistes, le Situationnisme, Fluxus, etc. DAM était-il en contact avec ce type de publication ou avec un projet similaire aux États-Unis ?

Nous admirions tous l’avant-garde européenne – et c’était certainement une influence – mais la radicalisation de DAM s’est produite autour de la scène politique de la jeunesse de Detroit et d’Ann Arbor. Le White Panther Party (WPP), SDS, The Weathermen et les Black Panthers étaient fortement actifs et ont laissé une marque indélébile. Nous étions familiers de l’histoire de l’art avant de nous rencontrer.

Certaines affinités avec l’histoire de l’art sont visibles dans le premier numéro, notamment avec le manifeste de Kelley, « What Destroy All Monsters Means to Me », les images kitsch, transgressives, radicales et une présentation hyper-colorée. Nous étions coincés entre les mouvements hippies et punk et avions mélangé tout cela, en prenant une position post- apocalyptique. Si l’on s’était développé davantage, cela aurait peut-être pu devenir quelque chose comme le mouvement Cass Corridor à Detroit ou une branche du pop art psychédélique.

Nous étions également fans de l’artiste Gary Grimshaw qui avait réalisé des affiches psychédéliques pour la Grande Ballroom et était ministre de l’Art dans le WPP. Son travail était représentatif de la révolution et de la conscience altérée, et cette vision utopique était aussi celle que nous avions embrassée.

Nous avons été inspirés par le WPP, qui était en pleine dissolution lorsque nous nous sommes réunis. Kelley a déclaré que le WPP l’a conduit vers les arts d’avant-garde et était la raison pour laquelle il est devenu artiste. Shaw et moi avons eu une expérience similaire. Les MC5, les Stooges et la scène rock de Detroit nous ont inspirés. Le Detroit Artist’s Workshop (DAW) a été la clé du radicalisme du Midwest. Cette année en avril, une petite exposition a eu lieu au musée du Horse Hospital à Londres. C’était la première reconnaissance du collectif DAW en Europe.

Depuis la fin des années 1990, j’ai recueilli des documents et des écrits sur le DAW, la racine du collectif des White Panthers. John Sinclair (manager des MC5) et l’un des fondateurs de DAW et président du WPP ont déclaré : « La musique est la révolution … et il faut voir chaque action comme le futur de l’histoire ». Être acteur de la culture était un modèle important pour nous. Le nom de DAM était également une sorte de slogan politique / artistique futile qui peut se résumer dans la citation de George Orwell : « Tout art est propagande ».

Tu as récemment travaillé sur un livre autour de Leni Sinclair [sorti chez Foggy Notion] et tu as lancé ta librairie « Book Beat » il y a 34 ans. Ces deux activités semblent être un projet politique et social dans le sens où tu souhaites être d’un côté la voix de l’underground et de l’autre préparer les futures générations en mettant à disposition une section jeunesse au sein de ta librairie. Vois-tu aussi Book Beat comme une œuvre d’art ? D’où vient cette relation spéciale aux livres, aux documents, à l’écriture, et à la pratique de l’archive ?

Ma chambre d’adolescent ressemblait à un album de coupures de presse underground scotchées : des images de films de Jack Smith, des Up Band, des affiches du MC5 et une autre de Sinclair sur laquelle il ressemble à un bombardier dingue avec sa fille Sunny sur ses genoux, grignotant des biscuits en forme d’animaux. Nous nous découvrons au fur et à mesure de notre sortie de l’enfance.

Beaucoup de ces images étaient de Leni Sinclair et elles ont influencé mon regard. Ses images étaient omniprésentes dans Guitar Army ainsi que dans l’art de Grimshaw, ce qui m’a permis de me rendre compte du pouvoir de la photographie et du design. J’ai vu comment la photographie pouvait être une arme, une source de changement positif. L’art et la politique m’ont interpellé très jeune, ainsi que ma passion de collectionneur : au moment où les affiches, les disques et les livres prenaient un sens pour moi.

L’un de mes trésors lorsque j’étais un jeune hippie était l’affiche John Sinclair Freedom Rally datant de 1971, conçue par Gary Grimshaw avec un portrait frappant de Sinclair pris par Leni. C’était l’un des premiers et peut-être le seul concert de rock avec un but politique : libérer Sinclair de prison, alors qu’il purgeait une peine de dix ans pour possession de deux joints de marijuana.

En 1998, j’ai suggéré la venue de Leni Sinclair au musée Boijmans Van Beuningen de Rotterdam pour le festival I Rip You, You Rip Me, une rétrospective sur DAM et l’avant- garde de Detroit, organisée par Ben Schot et Ronald Cornellisen. C’était la première exposition sur l’avant-garde de Detroit hors de sa ville natale. Pour comprendre DAM en tant que groupe régional, il était préférable de commencer par Leni. Elle était la conservatrice de cette époque, ses archives photographiques en étaient une preuve évidente.

En 1982, j’ai ouvert une librairie pour plusieurs raisons, avant tout pour des raisons pratiques. Lorsque j’étais étudiant, j’ai travaillé dans plusieurs librairies et j’ai pensé que c’était quelque chose qui pouvait devenir aussi une ressource communautaire. Ma femme Colleen a développé une section jeunesse, qui est maintenant la partie la plus importante du magasin. Intéresser les enfants à la littérature aide à former de futurs lecteurs.

La librairie est pour nous un espace créatif, un laboratoire personnel : un lieu de réflexion sur l’art et l’émergence de nouveaux projets. Pendant de nombreuses années, nous avons montré des artistes et des photographes dans une petite galerie au fond de la librairie et j’ai beaucoup appris de ces expositions. Les livres sont des choses magiques, des objets qui parlent à travers les âges. Ce sont des machines portables à remonter le temps. C’est incroyable de lire les pensées d’un auteur à travers le temps, d’entendre leur voix vibrer dans notre tête.

En tant qu’« homme-bibliothèque » et « mémoire publiée », comment expliques-tu cet enthousiasme pour le zine? Quel regard portes-tu sur la scène zine actuelle ?

La scène actuelle confirme la beauté du livre comme objet. On assiste à un renouveau de l’impression typographique, très fort à Detroit, lié à une longue histoire d’innovation industrielle et de révolte. Le retour du zine fabriqué à la main montre une opposition positive aux blogs, à l’oppression technologique, à la production de masse, mais aussi à l’absence de conversations réelles.

Le zine des années 90 était bien distribué, les critiques étaient régulières, bénéficiant d’un réseau important. Factsheet 5 était le meilleur et le plus grand compendium de la scène. Les articles de presse sont essentiels pour que la scène survive. Internet peut servir de filtre, mais les supports physiques et plus substantiels sont nécessaires.

Les librairies et les magasins spécialisés jouent un rôle primordial pour rendre le travail plus accessible. Les festivals de Zine tels que Rebel-Rebel sont d’excellentes plateformes qui doivent être développées. Les zines représentent le potentiel et l’expérience. Ils sont souvent un tremplin pour de nombreux artistes. Les zines sont des galeries portatives, remplies d’idées et d’images : un lieu où le risque peut encore être récompensé.

Dans les années 1970 les art zines étaient très peu suivis et le réseau était encore discret. À l’exception des bandes dessinées underground, la plupart des zines ont été échangés sous forme de Mail Art. Printed Matter Inc. à New York était un haut lieu de diffusion qui, heureusement, existe toujours. On perçoit désormais un intérêt affirmé pour le travail historique. Les musées collectent et exposent les art zines. Quand quelque chose d’aussi éphémère et obscur resurgit, c’est un rayon d’espoir.

L’âge du Jazz est peut-être fini, mais son esprit reste vivant. Les révolutions commencent toujours dans l’underground où elles peuvent rester cachées pendant des années pendant lesquelles elles se fortifient et s’intensifient. La révolution zine se répand à nouveau, cherchant une nouvelle respiration. Elle arrive à un moment où la résistance est plus que nécessaire.

Paris,

November 11th, 2011

One night in Paris, in 2011, Laura Morsch-Kihn invited me to have a drink with her and Cary Loren at the bar of the Hôtel Regina. The atmosphere was strange; we were alone in this incredible 1900’s decor, the waiters looked like they were from a Hitchcock movie, and we saw a little mouse running around. On this night bathed in such a decadent atmosphere, Cary told us about one of his favourite books, À rebours written by Joris-Karl Huysmans. Five years later, she finally understood his attraction for the eccentric anti-hero Jean des Esseintes, a symbol of the decadent spirit of the XIXth century.
If you take a look at the artistic works of Cary, you will find a tendency to dwell at the heights of artifice with an excessive taste for the strange and the unequalled of all kinds.
As the editor of Destroy All Monsters Magazine, and founding member of Destroy All Monsters (DAM) collective, Cary Loren injected his idea of art in total symbiosis with the members of the 1970’s collective, freshly out of adolescence: Niagara, Jim Shaw, and Mike Kelley. The DAM zine is a family album, a permanent mobile exhibition, a therapeutic treatment, a psychedelic camp trip into the underworld of the underground, and a subliminal “mise en scène” that mythologizes the band.
We had the chance to meet the multifaceted Cary Loren in a conversation like a collage, taking us into the mechanics of the DAM zine and other Detroit experiences. Laura asks all the questions. I am making myself invisible, almost as if I weren’t there.
Cary, as you were influenced by all the monsters movies you were seeing, you started to make fan movies when you were 12 years old. Since that time and your apprenticeship with Jack Smith in 1973, your film practice became really intense. I really see a connection between your movie practice and the zine DAM. We find the same attraction for colour, for crazy montages and superimpositions. Did you realise the zines in the same way you were making films?

It’s a good question because connections between photography, art, writing (and all of life) can overlap in zines and function in ways related to film or novels. The zine often works like a private diary or journal moving through time, taking on multiple subjects, narratives, or points of view. Zines can overlap the public and private worlds at the same time.

This wasn’t a conscious decision, but I’m reminded of how attracted I was to underground comics and tabloids of the 1960s: anthologies like Zap, Mad, Cracked and Weirdo. These were godfathers of the zine movement.

The aesthetics of the 1960s underground papers were fascinating: The Chicago Seed, The Berkeley Barb, Sundance, The Sun, The Ann Arbor Argus, The Fifth Estate and the San Francisco Oracle: leftist tabloids with intense colour, psychedelic design, and an anarchistic viewpoint. I wanted to achieve a similar aesthetic in DAM—a flashback in time.

A zine could become self-reflective, a source of poetry with its own secret codes and language—the zine as a contained poem.

The zine could break away from film or writing, allowing you to step aside and see the work in a different, more playful, chaotic (or static) way. It could be the outline you’re looking for or the reason you no longer need to make a film.

Jack Smith’s theatre was another influence—his films, writings, colour slides, his Beautiful Book, his presence and apocalyptic imagery I found fascinating. DAM was a homage to Smith’s exotica and a collage of visual obsessions. The world of silent films, the gestures of Marlene Dietrich, Andrea “Whips” Feldman, Jennifer Jones, Dorothy in Oz and monster films could all exist as neighbours, extreme images bouncing off each other. Smith validated what I was searching for, and I blame Smith for the invention of DAM.

Finding solutions to making films and zines forced decisions such as buying outdated film, using scotch-tape splices, or printing on top of old flyers to save money on paper—a similar strategy in Smith’s trash-camp film aesthetic.

An editor or artist/author has near-total control with the zine. They are the content supplier, manufacturer and distributor. The zine can be a song, a small enchantment, a multi-dimensional object, bending the boundaries and defying the form itself. The zine is propaganda art: to self-advertise, to convert, to rant, to cast a spell, and to act as a link to other projects in film, music or writing. Zine definition: The skeleton of a myth.

I like the idea that “zines can overlap public and private worlds at the same time,” and if the zine can be highly personal it’s also a direct and clandestine interaction in the private sphere of the everyday life of the viewer. So what was the reaction of the viewer at this time in front of this zine transforming everything into a camp aesthetic? DAM was an anti-rock band, was the DAM zine an anti-zine? Something weird in the landscape of zine? At this moment, the majority of its pages were in black and white and were related to one discipline (music, politics, comix, …) and were seriously political.

At the time of making the zine, the audience was nonexistent. On a simple level, it was important to project DAM art to the public—to just get it out there. I don’t understand why the need came about or why a thousand copies were printed of the first issue. Only a few record shops and bookstores were willing to distribute zines, and it took several years to sell out the first issue. Most were given away. I never heard from people who bought the DAM zine. There was never any feedback.

Making the zine was a way to keep the DAM collective together even as it was breaking apart. In 1977 and 1978, Kelley and Shaw were at CAL Arts in Los Angeles, I was thrown out of the band, moved to Detroit, and enrolled at Wayne State University. Those were transitional years, and the zine documents that like a diary. By late 1978, Niagara was the only original member left in the band, and Ron Asheton continued the music in a punk/rock direction.

It was an anti-zine for an anti-band. Our music didn’t circulate well until 1995, and still it remained a minor cult interest. There’s a schizophrenic nature to DAM. It had both punk rock and a noise following. People mainly know the zine through the reprint Primary Information published in 2009 and the experimental music from the 3-CD set released on Ecstatic Peace! in 1994. Mass appeal will never exist for the kind of music we produced. It’s too abrasive and weird, resistant to popularity.

The zine framed and distributed our artwork and was a way to experiment with narrative and themes. Multiple disciplines were presented in each issue. For instance, issue #4 had a complete band history, but it also referenced family rituals, the family photo album, holidays, underground films, and the practice of photography.

The last two zines, #5 and #6, were centred around theatre and film—an area I wanted to pursue further. They were assembled in Hollywood, California, in 1978 and 1979 and parodied film noir, horror, exploitation, and romance through film stills. This collided with poetry, band lyrics, a reprint of Antonin Artaud’s Theatre of Cruelty essay and fantasy/sci-fi illustrations. Kelley and Shaw works were also in the last issue, along with a promotion for Xanadu, made up of X-members of DAM: Ben and Laurence Miller, Rob King, and myself. We were all dissatisfied with the punk (Asheton led) direction of DAM, so I began a small label and released two EPs on Black Hole Records: Days of Diamonds (1978, DAM) and Blackout in the City (1979, Xanadu).

DAM magazine was a blending of daily life and art, quoted alongside public artworks and figures in pop culture. The mixing of these spheres was a way to shape our identity, with both the public and private absorbing each other, transforming experience.

Zines are an open field where anything can enter. They can take on risky subjects: hallucinations, pop-stardom, and serial killers, or they can condense into a single subject: 8-track Mind, Hirsute Heroines, and Dishwasher.

There was never a conscious decision to project a political ideology in DAM Magazine. We respected radicalism and hoped that came through in the artwork. We were bored with the Marxist-Maoist rhetoric and were somewhat miffed at seeing the hard left vanish in the night.

I wasn’t aware of many other zines in the 1970s, and there were few models to see at that time except in the world of sci-fi or fantasy fandom. Music zines and art zines started to appear more frequently in the late 1970s and were pop-culture oriented, mostly centred on punk—almost a return to the Beat era mimeograph revolution of DIY poetry and art zines.

So you went to Hollywood to set a scene and produce a zine (focus on theatre and cinema) as you could go there to set a scene and produce a movie? What kind of influences had the experience of L.A with her aura on DAM? Was this experience part of the mythologization of DAM?

I moved to North Hollywood during the spring and summer of 1978 and again in 1979. At the time, I began to write and thought about film as a concept.

I wrote some intense fantasies and poems based on old movie stills I collected. I wrote one novella titled Something Else, and later printed one hundred copies. Some of this entered the DAM zines. It was a time to organise my thoughts about the band. I was frequenting the bookshops on Hollywood Boulevard near Highland that specialised in movie memorabilia. I was obsessed with reading film biographies and histories and looking at stills. Larry Edmunds was one of the best. It was an education to browse through thousands of movie stills. I visited with Shaw and Kelley on that trip, and began to assemble the last two DAM zines. These last two issues used some of the stills I picked up. I also found a cheap place to reproduce colour Xeroxs in Hollywood and made a special edition of about 50 copies with colour collages.

It was a strange time to be in Hollywood. I really liked it but was also repelled by it. I knew I couldn’t live there.

It sounds like it took quite a long time to make an issue and to reach the quality of the DAM zine you wanted. Is it for that reason you only made 6 issues in 3 years (1976-1979)? Or was it because, as an anti-rock band, you wanted to have very few music releases? Even if you ended up making more zines than records in this period.

Cary: It took about a year to print the first issue, made mostly by high-speed offset lithography. I took classes at a vocational school and learned to use a copy camera, make halftones, and operate the printing presses. I wasn’t the best printer and was embarrassed by how sloppy it all turned out. The issues never had the quality I wanted to produce or could afford. Most of the front covers were printed at a commercial print shop, so at least they’d look well done.

I advertised our first music release: Destroy All Monsters Greatest Hits cassette inside the first DAM issue and in the first issue of Lightworks Magazine. We sold less than thirty copies of the tape for $2 each. As the band evolved, its history and music were covered like news items in the zine.

In the summer of 1978, I put together issue #5 in Hollywood and returned in 1979, to layout issue #6. I almost stayed in Los Angeles but returned to attend Wayne State University in Detroit, where the last two issues were printed in the student print shop, volunteering there in exchange for printing the zine. Special copies of issue #5 contained a full colour Xerox insert, an expensive process at the time. It was a slow and complicated process, waiting until there was enough material to finish an issue.

It all came down to economics. Pressing records was (and still is) an expensive process. We wanted to do that, and were headed in that direction, but it was beyond us. Printing the zine was more realistic, and there was an advantage to learning the process and working in print shops after hours.

It’s important for us to understand why the DAM zine has become cult, apart from its originality and the success of Mike and Jim in the contemporary art scene. If the DAM zine was a way to continue the collective experience after the original group broke apart (Mike Kelley, Jim Shaw, Niagara),  can we say that it was a kind of “mise en scène” of the DAM collective? Then maybe it would be more accurate to talk of your role as a stage director rather than an editor? Unconsciously, you were using fiction tools (cinema, theatre,…) and the glamour of colour to construct a kind of story-telling or fan-fiction?

Cary: Yes, “mise en scène” is a good description—and fanfiction too. I wanted to include all our influences and make a statement with images: something raw, exploitative, maybe shocking. Everything was thrown into the blender. The film and theatre influences helped create a setting for the zine too.

Kelley later described DAM as a work of sculpture or method for his art: “This band was my painting strategy made flesh,” he said. Perhaps that idea arose from the practice room being adjacent to his bedroom. It was a very messy space next to his immaculate living area. At the time of DAM, Kelley’s work was rough, fiery, grotesque, and cartoonish. It was passionate without a conceptual edge. The practice room may have been an intrusion or invasion of privacy, but it also enabled some subversive rawness.

Shaw’s paintings had a surreal collaged element and an abstract way of using the figure that came closest to the aesthetic I was working with. God’s Oasis (the commune we practiced in) was Shaw’s major creation. The house was filled with decor-rejects: found kitschy objects Shaw carefully sought out and arranged—and was also home to his extensive record and comic collections. God’s Oasis was our hangout and a major influence on us all.

The idea of creating fiction within the zine is interesting because of our habitual self-mythologizing. Fragments of lyrics, films, and stories were included in the zine, reflecting this hyper-creative atmosphere. I saw the collective as part of a socialist project—blending our art together, growing and overlapping in as many directions as possible. A lack of money and time cut the project short. Outside of the music, the zine enabled DAM to continue beyond its lifetime—and maybe that’s the fiction I wanted to tell, the myth of an immortal DAM.

In 2009, I assembled a show of DAM archives along with Printed Matter’s head of programming, James Hoff. This Hungry for Death exhibit travelled around Europe and a few cities in the USA until early 2012—a project meant to level any hierarchy within DAM.

The last DAM archive show was curated by Kelley and Dan Nadel at PRISM Gallery in Los Angeles. Kelley’s vision of the band was far different. It was a cleaner, neatly framed, and well-organised exhibit, showing the work as individual artists. A catalogue for that show: Return of the Repressed tells the story. The show closed two weeks before Kelley’s suicide.

When the DAM zine appeared, the members were quite young, and we could really feel their curiosity and freshness. At the same time, we see great maturity in the references and the way to conduct the project. DAM zine was really an art project, using a medium as a support for a group of artists, just as it was for such European avant-garde journals as Dada, Surrealists, Situationnism, or Fluxus. Was DAM in contact with this kind of project or similar projects in the USA?

Cary: We all admired the European avant-garde, and that was certainly a factor, but DAM’s radicalization happened around the political youth scene around Detroit and Ann Arbor. The White Panther Party (WPP), SDS, the Weathermen, and Black Panthers were strongly active in the late 1960s and early 1970s. We were familiar with art history at a young age—before we met each other.

You can see certain affinities with history in the first issue of Kelley’s manifesto, “What Destroy All Monsters Means to Me,”  with its kitschy, transgressive images and hyper-colour presentation. We were caught in-between the movements of hippies and punks and proceeded to “fuck with” different parts of that, taking a post-apocalyptic stance. It might’ve been transformative if developed, perhaps something like the Cass Corridor movement in Detroit—but more psychedelic and pop.

We were also fans of artist Gary Grimshaw, who made psychedelic posters for the Grande Ballroom and was Minister of Art in the WPP. His work was symbolic of revolution, and that utopian outlook was something we embraced.

We were inspired by the WPP, which was just breaking up when we came together. Kelley has said the WPP led him into the avant-garde arts and was the reason he became an artist. Shaw and I had a similar experience. The MC5, Stooges, and the Detroit rock scene were inspiring to us. The Detroit Artist’s Workshop (DAW) was key to the radicalism of the Midwest. In April of this year, a small exhibition was held at the Horse Hospital Museum in London. This was the first time the DAW collective was recognised and displayed in Europe.

Since the late 1990s, I’ve been collecting materials and writing about the DAW, the root collective behind the White Panthers. John Sinclair (manager of the MC5), one of the founders of the DAW and Chairman of the WPP, said, “Music is revolution… and to look on each action as future history.” Being a culture worker was an important model for us. The name DAM was also a type of futile political/art slogan that could stand by itself. “All art is propaganda,” said George Orwell.

You are working on a book about Leni Sinclar [published by Foggy Notion], and I read that you started your shop, Book Beat, because of DAW. Your bookshop and publishing activities seem to be a political and social way to be the voice of the underground. Do you also see Book Beat as artwork? A big in-progress collage of books like you usually work in your collages and films. Where does this special interest in books, documents, and archives come from?

My teen bedroom was a scrapbook of scotch-taped underground news clippings; Jack Smith film stills, The Up band posters of the MC5, and another of Sinclair looking like a mad bomber with daughter Sunny on his lap, munching a box of animal crackers. We discover ourselves as we grow out of childhood.

Many of these images were by Leni Sinclair, and they informed my outlook. Guitar Army was filled with her work, and the art of Grimshaw, allowing me to see the power of photography and design. I saw how photography could be a weapon, a source for positive change. Art and politics came together at a young age. And the collecting bug also comes out of childhood—when posters, records, and books first took on meaning.

One of my early treasures was the 1971 John Sinclair Freedom Rally poster, designed by Grimshaw with a striking portrait of Sinclair shot by Leni. This was one of the first rock concerts with a political purpose: to free Sinclair from prison, receiving a ten-year sentence for possession of two marijuana cigarettes.

In 1998, I suggested that Leni Sinclair come to the Boijmans Van Beuningen museum in Rotterdam for the I Rip You, You Rip Me festival, an investigation into DAM and the Detroit avant-garde curated by Ben Schot and Ronald Cornellisen. This was the first survey of the Detroit avant-garde outside its hometown. To understand DAM as a regional group, it was best to start with Leni. She was the keeper of the photographic record.

In 1982, I opened a bookstore for many reasons, but most of all, it seemed like a practical thing to do. I worked at other bookstores while making my way through college and thought this was possible and could serve as a community resource. My wife, Colleen, developed the children’s department, which is now the strongest section of the store. Turning children onto reading helps ensure future readers.

We think of the bookstore as a creative space; it’s also a personal laboratory—a place to think about art and new projects. For many years, we showed artists and photographers’s work in a small backroom gallery, and I learned a lot from those exhibits. Books are magical objects that talk through the ages—portable time machines. How amazing to read the thoughts of an author across time, having their voices come alive in your head.

As a “library-man” and a “published memory,”  how do you explain the recent enthusiasm for zines? What is your view on the current zine scene?

Cary: The current scene is a confirmation of the beauty of the book as a physical object. A revival of letterpress has also exploded and is strong in Detroit, where there is a long history of industrial innovation and revolt against it. The return to the hand-made zine shows a positive opposition to weblogs, technology, mass production and is another reaction to the lack of physical conversations taking place.

The zine revival of the 1990s had good distribution, reviewers were common, and there was an evolved network of support. Factsheet 5 was a good compendium of the scene. The need for reviews is essential for the scene to survive. The internet can serve as a review funnel, but this still needs to grow in a more physical, substantial way. Public bookstores and specialty shops are needed to make the work more accessible. Zine festivals such as Rebel-Rebel are a great service, and need to expand. Zines represent potential and experiment. They are often a starting point for many artists: portable galleries of ideas and images, a place where risk can still find reward.

Artist zines in the 1970s had a small following, and the network was weak. Except for underground comics, most zines were traded as mail art. Printed Matter of New York was one of the first guiding lights and is thankfully still around. Recent interest in historic work has grown to a respectable level. Museums are collecting them and even displaying the work. When something so ephemeral and obscure returns to life, it sends out rays of hope.

The Jazz Age may be gone, but its spirit is alive. Revolutions always begin underground, where they can stay hidden for years, gathering strength below. The zine revolution is once again percolating, searching for air. It comes at a time when resistance is most needed.

Destroy All Monsters magazine #5
Cary Loren (ed.), *Destroy All Monsters magazine #5*, Dédié à Antonin Artaud, Los Angeles, Janvier 1979, photocopie noir et blanc et couleur, 46 pp. Cary Loren (ed.), *Destroy All Monsters magazine #5*, Dedicated to Antonin Artaud, Los Angeles, January 1979, B/W and colour xerography, 46 pp.
Destroy All Monsters magazine #6
Cary Loren (ed.), *Destroy All Monsters magazine #6*, Special Hollywood, Los Angeles, 1979, photocopie noir et blanc et couleur, 48 pp. Cary Loren (ed.), *Destroy All Monsters magazine #6*, Special Hollywood, Los Angeles, 1979, B/W and colour xerography, 48 pp.
Destroy All Monsters magazine #3
Cary Loren (ed.), Destroy All Monsters magazine #3, Octobre 1978, photocopie noir et blanc, 26 pp. Cary Loren (ed.), *Destroy All Monsters magazine #3*, October 1978, B/W xerography, 26 pp.